
Ti West est un cinéaste américain œuvrant depuis les années 2000 dans le cinéma horrifique avec entre autres The Roost, son premier film long, ou encore la suite de Cabin Fever et The House of the Devil. Dans les années 2010, il réalisa aussi quelques films dont The Inkeepers et The Sacrament, tous deux ancrés dans le cinéma de genre. Son grand retour dans ce genre si cher à notre cœur se fit en 2022 avec X, qui suivait une équipe de tournage d’un film pornographique amateur, dont chaque membre allait se faire assassiner par le couple de personnes âgées qui les logeaient pour la nuit. C’est alors que, à la surprise générale, fût annoncée dans la foulée de la sortie de X, un préquel à ce dernier, dénommé Pearl – le prénom de la logeuse meurtrière dans X. Mais de quoi nous parle-t-il ? Coincée dans la ferme isolée de sa famille, Pearl doit s’occuper de son père malade sous la surveillance amère et autoritaire de sa mère dévouée. Aspirant à une vie rêvée digne d’un film, les ambitions, les tentations et les répressions de Pearl entrent en collision, jusqu’au point de non-retour…

Conte de fées désenchanté et psychanalyse malsaine
Visuellement foisonnant, Pearl utilise à merveille les saturations de couleurs, qui comptent pour beaucoup dans l’esthétique de conte de fées désenchanté de l’ensemble, dans un hommage prodigieux au Technicolor, mais aussi et surtout, une plongée lugubre dans la psyché de Pearl, où si l’on gratte les rêves apparents, l’on découvre des cauchemars traumatiques et une femme brisée par l’âpreté de ce qu’elle voit comme une banale existence. Une folie des grandeurs habitant notre protagoniste qui va essayer de fuir au travers de l’écran, coûte que coûte, mais où elle ne fera que se briser de fil en eau. C’est une psychanalyse fascinante que donne à voir TI West, qui arrive à nous rendre autant détestable que profondément empathique Pearl, ce qui est la grande force du film, le cinéaste allant au-delà des clichés de la femme psychopathe pour offrir assez de subtilité pour lui créer une âme sensible qui ne fait que nous attacher à elle. Mais cela serait impossible sans la performance grandiose de Mia Goth, passant des larmes au sourire en une demi-seconde et transmettant magnifiquement la détresse de Pearl, amenant graduellement les émotions sur son visage, qui trouveront leur paroxysme dans un monologue perturbant mais qui, surtout, arrive à toucher en plein cœur au point où l’on se questionne sur la malsanité de nos ressentis. Cette malsanité qui se ressent aussi dans les côtés assez glauques du film, notamment dans la conclusion, qui est plutôt impressionnante dans son immoralité. Et pourtant, Pearl n’est pas dénué de morale, ou plutôt de thématiques, West abordant encore et toujours la vieillesse, cette fois-ci sous l’angle de la peur de son arrivée, même si le film est, encore une fois, beaucoup plus thématiquement concentré sur la psychologie de sa protagoniste. En conclusion, Pearl est un métrage royal qui abonde d’idées visuelles et scénaristiques, qui brise son spectateur et dissèque à la perfection son personnage, de ses traumatismes à leurs conséquences et qui réussit complètement le pari du préquel. A noter que MaxXxine, le dernier film de la trilogie, sort le 31 juillet 2024 en France sous la bannière de Condor Films ; les attentes sont présentes, à voir si elles seront récompensées.
PEARL. De Ti West (USA – 2022). Genre : Horreur, Drame. Scénario : Ti West, Mia Goth. Photographie : Eliot Rockett. Interprétation : Mia Goth, David Corenswet, Tandi Wright, Matthew Sunderland, Emma Jenkins-Purro… Musique : Tyler Bates, Tim Williams. Durée : 102 minutes. Disponible en VOD/DVD.

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