Le réalisateur italien Raffaele Picchio a été pour le moins marqué par la quadrilogie d’Amando de Ossorio consacrée aux célèbres Templiers morts-vivants qui a fait le bonheur des amateurs de bisseries au début des années 70. L’influence de cette dernière était déjà palpable dans les premiers films de Picchio (Morituris : Legions of the Dead), mais elle est directement assumée dans La Malédiction des morts-vivants, alias Curse of the Blind Dead, sorte de suite hommage à l’œuvre du cinéaste espagnol. Avec un budget fait de bouts de ficelles, un lieu de tournage unique et une équipe motivée et acharnée, le réalisateur a réuni autour de lui suffisamment de compétences et d’envies pour boucler ce film fauché comme les blés mais visiblement très motivé pour faire renaître la saga des templiers morts-vivants.
Après un prologue très réussi, sans conteste la meilleure scène du film, qui fait le lien avec les œuvres d’Amando de Ossorio, montrant au XIVe siècle, un rituel mené par un groupe de templiers adorateurs de Satan interrompu par des villageois qui les exécutent sauvagement, le film fait un saut dans le temps pour déboucher dans un avenir incertain et dévasté, où l’on suit un homme et sa fille luttant pour leur survie, et se retrouvant au sein d’un étrange groupe pour affronter les templiers morts-vivants…

Cache-misère
Avec La Malédiction des morts-vivants, on est face à un film qui ne peut dissimuler longtemps ses maigres moyens, c’est une certitude. Le réalisateur et son directeur de la photographie tentent par toutes les astuces visuelles de cacher la misère en misant sur des retouches à l’image, comme ces filtres orangés un peu envahissants, renvoyant évidemment à la quadrilogie d’Amando de Ossorio, mais pas du meilleur goût pour autant. L’interprétation très inégale n’aide pas non plus, et la pauvreté des décors et de la direction artistique ne tirent pas l’ensemble vers le haut.
Cependant, cette Malédiction des morts-vivants ne flirte pas pour autant vers le nanar haute catégorie. Car Raffaele Picchio a des envies et sa foi envers le cinéma de genre est bien perceptible. Y compris dans ses choix les plus incongrus. Notamment dans la volonté assumée de placer l’action dans un univers visiblement post-apocalyptique. Une orientation induite par l’absence de moyens (c’est plus simple de légitimer narrativement un tournage dans la forêt et dans une ruine), autant que par les contraintes du tournage, mais également par l’audace de vouloir innover.

Une foi inébranlable dans le genre
On retrouve dans La Malédiction des morts-vivants un certain nombre d’éléments à bannir typiques des petites productions B lorgnant vers le Z : une photographie grisâtre assez peu engageante ou trop chaude et totalement artificielle, des manquements terribles dans la direction d’acteurs, un scénario prétexte aux pistes pas inintéressantes (l’endoctrinement des masses), mais jamais développées… Cependant, la foi du réalisateur envers ses créatures met du baume au cœur, tant par sa façon de les filmer, de les mettre en valeur, que par leur aspect (maquillages très réussis) et dans les effets gores au sein de scènes assez cradingues et convaincantes. Raffaele Picchio multiplie les références, le film donne tout ce qu’il a et ça tombe bien, c’est un peu là qu’on l’attendait.
Difficile de remettre en cause la sincérité de Raffaele Picchio qui œuvre à faire du mieux possible avec tous les moyens à sa disposition. Ca n’en fait pas un bon film pour autant, mais un effort qui mérite d’être souligné. A noter que, malgré ses faibles moyens, le film profite de la participation assez rapide de Fabio Testi (Mais qu’avez-vous fait à Solange ?) dans un rôle de tortionnaire sadique.
LA MALEDICTION DES MORTS-VIVANTS (Curse of the Blind-Dead). De Raffaele Picchio (Italie – 2020).
Genre : Horreur. Scénario : Lorenzo Paviano et Raffaele Picchio. Photographie : Alberto Viavattene. Interprétation : Aaron Stielstra, Alice Zanini, Francesca Pellegrini, Bill Hutchens, Fabio Testi, David White… Musique : Andrea C. Pinna. Durée : 87 minutes. Disponible en Blu-ray chez Le Chat qui Fume (31 mars 2024).

Le Blu-ray du CHAT QUI FUME. Pour un petit film de cet acabit, l’édition HD délivrée par Le Chat qui Fume est de très belle qualité. Même si l’image numérique reste très marquée, les choix visuels du cinéaste d’intervenir assez lourdement sur l’aspect visuel de son film, à grand renfort de grain et de filtres lumineux pas toujours du meilleur goût, apportent cependant une vraie identité visuelle à l’ensemble. De fait, les scènes plus sombres pêchent un peu dans leur définition, tant les contrastes sont parfois trop forcés. Pour autant, on le répète, le film gagne un écrin visuel de belle qualité avec cette édition. Côté sonore, la version originale anglaise est proposée sous deux formes : un DTS Master Audio 5.1 très dynamique et une version DTS HD Master Audio 2.0 moins percutante mais raisonnable.
Côté interactivité, au côté de la bande-annonce du film, l’édition propose une interview très intéressante de Raffaele Picchio, réalisateur pas avare de paroles et qui délivre un certain nombre d’anecdotes, toujours franc sur les difficultés et contraintes liées au tournage à petit budget, évoquant évidemment son amour des films de templiers morts-vivants d’Amando de Ossorio, le tout entrecoupé d’images du tournage (29′). Un module qui vient prouver la sincérité réelle du bonhomme, qui ne se traduit malheureusement pas toujours à l’écran.

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