Le roman Charlie et la Chocolaterie de Roald Dahl traverse les générations et continue d’alimenter l’imaginaire des petits et des grands. Après une première transposition à l’écran en 1971, dans le film homonyme de Mel Stuart mettant en vedette Gene Wilder, puis l’adaptation technico/gothique de Tim Burton avec Johnny Depp en 2005, c’est au tour de l’Anglais Paul King de proposer sa version, en fait un préquel, qui explore les origines de Willy Wonka, un nouvel aspect du personnage qui jongle entre fidélité au matériau original et larges libertés sur certains aspects. Un parti-pris payant, puisque le résultat fait honneur à ce créateur de chocolats magiques, doux-rêveur et entrepreneur de bonheur.

Destiné en premier lieu à un jeune public, Wonka reste cependant un petit bonbon sucré pour les spectateurs adultes. La raison de cette franche réussite a un nom : Paul King. Le réalisateur anglais nous refait le coup du diptyque Paddington, précédent coup de maître incontournable du cinéaste, qui avait su savamment doser les ingrédients de l’adaptation d’une œuvre pour enfants, avec ce charme « so british » et une mise en scène continuellement inventive. Des qualités que l’on retrouve ici à l’œuvre, et il y avait du boulot, tant l’opus de Tim Burton, globalement décevant et marquant déjà le déclin inexorable du cinéaste, nous avait laissé un souvenir peu convaincant. Wonka réussit en premier lieu à créer un univers crédible, à la fois merveilleux et inquiétant, s’appuyant sur des personnages certes, peu originaux, mais suffisamment écrits et incarnés pour que l’on puisse croire en eux. Autre choix payant, le recours aux décors et effets en dur qui, s’ils n’excluent évidemment pas l’usage d’effets numériques et autres fonds verts, apportent une consistance et une ambiance « à la Dickens » qui conviennent admirablement au film et à son histoire. Des décors et une direction artistique somptueux, sans être pour autant ostentatoires, que Paul King filme avec une inspiration réelle, le réalisateur emballant quelques séquences très réussies (l’arrivée dans la cité, la scène de la laverie, les souvenirs de la mère) et composant des images iconisantes fortes. Bref, un vrai plaisir de retrouver un véritable cinéaste derrière la caméra pour ce genre de projet plutôt destiné au jeune public.

Wonka revient à la comédie musicale assumée, à l’image du film de 1971, ce qui n’était pas vraiment le parti-pris de celui de Tim Burton. Pour autant, les séquences chantées et dansées étaient attendues au tournant, vu les récentes productions similaires disneyennes de triste mémoire. Sans être non plus révolutionnaires, ces moments s’avèrent très convaincants, notamment grâce aux morceaux écrits par Neil Hannon, leader du groupe The Divine Comedy et par le compositeur Joby Talbot. Entraînants et jamais lénifiants, les intermèdes chantés renouent avec une tradition de la comédie musicale historique comme pouvait l’être Mary Poppins tout en lorgnant vers une modernité discrète mais efficace et à propos. Il faut également souligner l’implication et la crédibilité de Timothée Chalamet, acteur encore difficilement saisissable, ici totalement investi dans le rôle titre, qui éclipse sans problème ses prédécesseurs et s’avère désormais LE Willy Wonka idéal, suffisamment charmant et naïf pour emporter le morceau. Un rôle sur-mesure. Le Oompa Loompa incarné par Hugh Grant offre quant à lui ce décalage parfait qui sied au personnage.

Bref, ce Wonka 2023 est une surprenante réussite, parfaitement amusant et mignon sans être niais, au fort pouvoir d’évocation, qui ne souffre pas outre mesure de quelques défauts de rythme, d’une seconde moitié moins marquante, lorgnant sur le film de casse, et qui trouve même le moyen de laisser poindre l’émotion dans son final. Que demande le peuple… Une belle surprise, mais venant de l’excellent Paul King, est-ce vraiment étonnant ?

Note : 4 sur 5.

WONKA. De Paul King (Etats-Unis/Royaume-Uni – 2023).
Genre : Comédie musicale. Scénario : Simon Farnaby, Simon Rich et Paul King, d’après le roman Charlie et la Chocolaterie de Roald Dahl. Photographie : Seamus McGarvey. Interprétation : Timothée Chalamet, Calah Lane, Keegan-Michael Key, Hugh Grant, Paterson Joseph… Musique : Joby Talbot, chansons originale de Neil Hannon. Durée : 116 minutes. Distribué en salles par Warner Bros. (13 décembre 2023).

Une réponse à « [Critique] WONKA de Paul King »

  1. […] du Festival d’Annecy 2023. Bonne nouvelle si vous êtes passé à côté ayant opté pour Wonka paru à la même période puisque l’enquête reprendra en DVD le mois […]

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