[Critique] AMERICAN MARY de Jen et Sylvia Soska
Les Freaks, c'est chic !
Bénéficiant d’une hype glanée dans de nombreux festivals de par le monde, American Mary des Soska sisters, est un drôle de film d’horreur qui ne manque pas d’ambitions et de qualités. Les frangines Soska, dotée d’un palmarès pour le moment étrange (Dead Hooker in a Trunck et See no Evil 2), semblent en effet avoir des choses à dire… Mary, la revenante Katharine Isabelle (Ginger Snaps), est une étudiante en médecine qui va trouver la solution pour arrondir ses fins de mois : réaliser des opérations clandestines pas toujours très propres… Au travers de ce pitch somme toute basique, Jen et Sylvia Soska parviennent à dérouler une intrigue assez solide, dans un premier temps en tout cas. Elles placent leur personnage central dans un monde où l’apparence joue un rôle primordial et dont les frontières vers l’underground le plus malsain sont des plus poreuses.
Chirurgie clandestine et transformations corporelles
Amercian Mary est en cela assez fascinant dans le sens qu’il ne trace pas sa route sur une ligne droite et attendue, au contraire. Les réalisatrices changent perpétuellement de ton et de genre, passant du suspense à l’horreur craspec et au rape and revenge, en n’oubliant pas d’ajouter quelques notes de comédie et un discours en arrière plan sur la condition féminine. Ambitieux on l’a dit, et malheureusement pas toujours maîtrisé, mais American Mary peut se targuer de surprendre constamment, ce qui constitue un bel effort. Décrivant de manière assez troublante un milieu où les dérives de la chirurgie clandestines et les transformations corporelles sont aussi courantes que des soins dentaires, le film navigue entre séquences démonstratives et suggestion efficace. Le tout, mis en scène avec une bonne dose de talent par les sisters qui soignent cadres et lumières, apportant un soin particulier aux freaks qui se succèdent à l’écran (se mettant elles-mêmes en scène dans la peau de jumelles souhaitant chacune s’approprier, au sens propre, le bras de l’autre…). Sans surprise, ces adeptes de la transformation physique sont les personnages les plus troublants et intéressants d’American Mary, présentés toujours avec une curiosité et un charisme qui ne laisse aucune place à la complaisance. A l’inverse des seconds rôles qui pâtissent très nettement d’un ancrage dans la réalité nécessaire mais qui, au final, alourdit l’intrigue (les hommes de main faisant disparaître les corps, l’inévitable enquêteur).
Même si le twist de la dernière partie ne convainc pas réellement, basculant dans le torture porn bas de gamme, que le film en devient forcément bancal (on a un peu trop l’impression de regarder un téléfilm américain des 90’s), il y a une belle énergie à relever dans cet American Mary, sorte de cousin éloigné de la série Nip/Tuck. D’autant que la charmante Katharine Isabelle semble embrasser le rôle avec beaucoup d’appétit, et qu’elle s’en sort remarquablement bien, apportant une ambiguité bienvenue au personnage : tantôt victime, tantôt bourreau. Une série B de bonne facture, suffisamment intelligente et avec ce qu’il faut d’audace pour sortir du lot. Et une carrière à suivre de près pour les Soska sisters…
AMERICAN MARY
Jen et Sylvia Soska (Canada – 2012)
Genre Horreur – Interprétation Katharine Isabelle, Antonio Cupo, Tristan Risk, David Lovgren, Paula Lindberg… – Musique Peter Allen – Durée 102 minutes. Distribué par Elephant Films – Sortie en DVD : 3 mars 2015.
L’histoire : Cherchant à se faire un peu d’argent pour payer ses études de médecine, la jeune Mary est engagée dans une boîte de massage, mais ce sont plutôt ses talents de chirurgienne qui attirent l’attention de son employeur. Elle accepte d’abord de soigner un homme torturé par les gros bras du salon, avant d’opérer quelques freaks qui cherchent les sensations extrêmes en modifiant leurs corps. Un pacte de sang qui va l’entraîner dans une spirale de violence de plus en plus extrême et insupportable.
Chronique réalisée en partenariat avec Cinétrafic, où l’on peut découvrir de bons films d’horreur récent ou les meilleurs de tous les temps.
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