[Be Kind Rewind] POUR TOI J’AI TUÉ de Robert Siodmak (1949)

Trois ans après Les Tueurs (The Killers, 1946), leur précédente collaboration, Robert Siodmak et Burt Lancaster remettent le couvert en 1949 pour le bien de Pour toi j’ai tué (Criss Cross), nouveau film noir aux contours similaires.
Adapté du roman homonyme de Daniel Fuchs, Pour toi j’ai tué contient en substance tous les ingrédients du parfait film noir. On y trouve les thèmes du hasard et de la fatalité, les manipulations entre personnages (et par extension le spectateur) sont légions, dans un vaste engrenage infernal au sein duquel le personnage de Steve Thompson (Burt Lancaster) croit tirer les ficelles, avant d’être lui aussi un pantin manipulé, au destin inéluctable. Une sensation renforcée par la construction même du film, avec un recours astucieux au flashback, procédé déstabilisant encore davantage la perception du réel et du vrai. La romance entre Steve et Anna (Yvonne De Carlo) est au cœur de Pour toi j’ai tué et en constitue son carburant, l’amour du héros lui dictant ses choix et ses actes, l’aveuglant jusqu’au point de non-retour.

Classique instantané

Techniquement, le film est un bijou visuel, doté d’un noir et blanc magnifique de contrastes et de nuances, grâce à la photographie de Franz Planer (collaborateur de George Cukor, Max Ophüls ou encore William Wyler). La mise en scène de Robert Siodmak n’est pas en reste, envoûtante et inspirée, elle embrasse l’intrigue et la nourrie de cette tension permanente, créant un suspense à couper au couteau qui baigne certaines séquences. On relèvera un modèle du genre : la scène de l’hôpital et sa gestion du temps, dans laquelle le spectateur, coincé au même niveau que le personnage principal sur son lit, angoisse de l’arrivée d’hypothétiques tueurs venant lui régler son compte.
Une atmosphère renforcée par la musique de Miklós Rózsa, qui a déjà collaboré avec le cinéaste sur Les Tueurs et oscarisé à plusieurs reprises (notamment pour Ben-Hur et Providence). A noter la première apparition d’un jeune comédien nommé Tony Curtis…
Loin de la simple photocopie du film noir extrêmement porteur à l’époque, répondant aux codes du genre tout en conservant sa part d’audace et de liberté, Pour toi j’ai tué reste à ce jour l’un des meilleurs ambassadeurs du film noir américain, un classique instantané qui n’a pas pris une ride, l’un de ses plus vénéneux représentants qui donnera lieu, en 1996, à un remake, intitulé A fleur de peau, réalisé par Steven Soderbergh.

Note : 4.5 sur 5.
POUR TOI J’AI TUÉ (Criss Cross)
Robert Siodmak (USA – 1949)
Genre Policier – Avec Burt Lancaster, Yvonne De Carlo, Dan Duryea, Stephen McNally, Esy Morales, Tom Pedi… – Musique Miklós Rózsa – Durée 88 minutes. Distribué par Elephant Films (6 février 2018).

Synopsis : Steve Thompson est convoyeur de fonds à Los Angeles. Attristé par son récent divorce, il ne songe qu’à récupérer Anna, son ex-femme qui s’est pourtant remariée avec Slim Dundee, un gangster qui ne lui inspire guère confiance. Pour tenter de les séparer, Steve décide de tendre un piège à Slim en organisant le braquage de son propre fourgon, glissant progressivement lui aussi dans le grand banditisme…

L’édition Blu-ray d’ELEPHANT FILMS

Technique

Note : 4 sur 5.

Dans une copie entièrement restaurée et présentée en HD, le film voit son noir et blanc magnifié avec tout particulièrement des contrastes magnifiques entre des noirs de charbon et une large palette de dégradés de gris. Le tout est agrémenté d’un grain assez léger. Les gros plans sont saisissants. Pas de défaut majeur apparent. Une très belle définition pour une image superbe.
La piste originale présentée ici en 2.0 DTS HD affirme une belle dynamique des différentes sources sonores. Le tout est très clair, notamment au niveau des dialogues.

Interactivité

Note : 2 sur 5.

Nouvel intervenant habitué d’Elephant Films, Eddy Moine présente le film, revenant sur le style de Robert Siodmak, et sur la carrière des comédiens. Le tout est agrémenté d’extraits du film qui réduisent d’autant ce court segment (une quinzaine de minutes) classique mais instructif. Une bande-annonce d’époque et une galerie d’images complètent la section.

Par Nicolas Mouchel

Créateur d'Obsession B. Journaliste en presse écrite et passionné de cinéma de genre, particulièrement friand des œuvres de Brian De Palma, Roman Polanski, John Carpenter, David Cronenberg et consorts… Pas insensible à la folie et l’inventivité des cinéastes asiatiques, Tsui Hark en tête de liste… Que du classique en résumé. Les bases. Normal.
Contact : niko.mouchel@gmail.com

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