[Be Kind Rewind] TONNERRE DE FEU de John Badham (1983)

La Bête de guerre

Assez peu considéré aujourd’hui, le réalisateur anglais John Badham était à la fin des années 70 et dans les années 80 un solide artisan, auteur de quelques films marquants de la décennie. Après le cultissime La Fièvre du Samedi soir (1977) et son adaptation de Dracula avec Frank Langella (1979), il s’engageait dans une série de trois films traitant de technologie futuriste et des bouleversements qui en découlent : Tonnerre de feu (1983), Wargames (1983) et Short Circuit (1986). Une trilogie très grand public mais qui avait le mérite d’interroger sur les les répercussions et les risques de mauvaise utilisation de ce qui apparaissait à l’époque comme de fabuleuses et fascinantes promesses d’avenir. C’est donc Tonnerre de Feu qui ouvrait le bal avec son hélicoptère à la pointe de la technologie militaire, ouvrant la voie aux films et séries télévisées centrés autour d’engins futuristes dont K2000 allait constituer la figure de prou. La fascination pour ce genre d’appareil comportant toute une ribambelle de gadgets démentiels fascinait autant qu’elle pouvait intriguer dans l’utilisation que le pouvoir et l’armée pouvaient en faire. C’est justement cet angle, entre curiosité et inquiétude, qui alimente Tonnerre de Feu. John Badham y signe finalement un film plus proche du polar urbain que du film d’anticipation, accordant une place aussi importante à ses personnages, en premier lieu Frank Murphy, incarné par le charismatique Roy Scheider, qu’à son engin futuriste. Le pilote d’hélicoptère, aussi talentueux que kamikaze, se mue en détective pour mettre à jour un complot dont le “Blue Thunder” est l’un des éléments clés. 

“We’re gonna need a bigger helicopter”

Si le scénario de Tonnerre de Feu, cosigné par Dan O’Bannon (Alien) et Don Jakoby (Philadelphia Experiment), s’embourbe quelque peu dans certaines figures caricaturales et passages obligés, que la caractérisation du personnage de Frank Murphy est un peu trop humanisée à la truelle (sa relation de couple), on y retrouve cependant une influence évidente du cinéma des 70’s, des thrillers politiques marqués par la paranoïa à l’égard du pouvoir et des institutions en place, dans la mouvance des oeuvres d’Alan J. Pakula ou encore Sydney Pollack. Ici, tout cela ne reste qu’effleuré, au stade embryonnaire, mais l’ambition est louable et plutôt bien menée, même si Tonnerre de Feu ne perd jamais de vue son statut de spectacle d’entertainment, dont le morceau de choix reste son hélicoptère maousse et les séquences d’action dans lesquelles il tient la place centrale. En excellent artisan, John Badham livre quelques séquences encore aujourd’hui très spectaculaires et l’affrontement entre le personnage de Roy Scheider et son ennemi, qui tient de la Nemesis, incarné par l’inusable Malcolm Mcdowell, reste un moment de choix qui fleure bon les confrontations du cinéma d’action de l’époque. On peut d’ailleurs être assez surpris par le jusqu’au boutisme de certaines scènes, notamment lors de l’affrontement final entre les deux hélicoptères en plein cœur de Los Angeles, au sein duquel les dommages collatéraux, autant matériels que (probablement) humains, pleuvent sans concession. Délivrant quelques très belles images, au sein d’un montage rythmé mais toujours lisible et efficace, Badham démontre ses réelles capacités de cinéaste de film d’action, sans talent démesuré ni personnalité artistique évidente, mais capable d’emballer un spectacle de près de 2h sans ennuyer le spectateur. Tonnerre de Feu donnera lieu dès l’année suivante à une courte série télévisée du même nom, qui perdra quelque peu ses velléités dénonciatrices et qui se plantera au bout de quelques épisodes. John Badham, quant à lui, poursuivra son exploration des nouvelles technologies avec toujours autant d’efficacité (et une bonne dose de naïveté) avec Wargames et Short Circuit

Note : 3.5 sur 5.

TONNERRE DE FEU (Blue Thunder). De John Badham (USA – 1983).
Genre : Thriller. Scénario : Dan O’Bannon, Don Jakoby, Dean Riesner. Interprétation : Roy Scheider, Warren Oates, Candy Clark, Daniel Stern, Malcolm Mcdowell… Musique : Arthur B. Rubinstein. Durée : 98 minutes. Disponible en Blu-ray chez ESC Editions (2 mars 2022).

L’histoire : Frank Murphy est un pilote d’hélicoptère très doué, on lui confie souvent de périlleuses missions et des machines très difficiles à piloter. Un jour, il est témoin du meurtre d’une femme et décide de mener son enquête. En parallèle, on lui demande de tester un nouvel engin dernier cri prévu pour surveiller les foules pendant les Jeux Olympiques. Au fur et à mesure de ses recherches, il comprend que l’assassinat pourrait être lié à la compétition sportive…


L’édition Blu-ray d’ESC Editions

TECHNIQUE. La copie proposée dans cette édition ESC est assez exceptionnelle, avec une très belle définition. L’image n’accuse jamais son âge, la lumière et les contrastes affichent une gestion de premier ordre, sans défaut apparent et dotée de couleurs éblouissantes. Un rendu qui sent bon le cinéma des années 70. La restauration sonore affiche elle aussi une très bonne dynamique. Les pistes en DTS HD Master Audio 5.1 assurent le spectacle, avec une spatialisation efficace. A noter, une fois n’est pas coutume, l’excellente qualité de la version française, dont le doublage est assuré par un panel de voix renvoyant au cinéma de l’époque, des timbres qui parleront aux habitués et aux nostalgiques, une qualité de doublage qui assure un visionnage dans la langue de Molière très appréciable. Un cas assez rare pour être souligné.

Note : 4 sur 5.

INTERACTIVITE. Cette édition propose une section de bonus assez fournie et on ne s’en plaindra pas. Pour autant, tout n’est pas d’un intérêt démesuré, mais permet de se replonger dans la conception du film, avec un making of découpé en trois parties, de 10 à 20 minutes chacune, explorant différents aspects : préproduction, production et post-production. Une autre featurette se concentre évidemment sur la star du film : l’hélicoptère en tant que tel, comment il a été pensé et réalisé. A cela s’ajoutent un commentaire audio du réalisateur, accompagné du monteur Franck Moriss et du superviseur des effets spéciaux Hoyt Yeatman, un clip promotionnel et une bande annonce.

Note : 3.5 sur 5.

Par Nicolas Mouchel

Créateur d'Obsession B. Journaliste en presse écrite et passionné de cinéma de genre, particulièrement friand des œuvres de Brian De Palma, Roman Polanski, John Carpenter, David Cronenberg et consorts… Pas insensible à la folie et l’inventivité des cinéastes asiatiques, Tsui Hark en tête de liste… Que du classique en résumé. Les bases. Normal.
Contact : niko.mouchel@gmail.com

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