C’est l’heure du Top/Flop de l’année 2024. Petit passage en revue de ma sélection, un Top 10 et un Flop 5, qui comprend un certain nombre de belles surprises venant du territoire canadien, et la confirmation que les films de requin sont toujours aussi excitants et proportionnellement toujours aussi médiocres (mais est-ce vraiment étonnant ?).
Top 2024
1- LES CHAMBRES ROUGES de Pascal Plante (Canada)

Film glaçant sur un sujet difficile, Les Chambres rouges trouve cependant sa légitimité dans une approche pertinente et un traitement maîtrisé de bout en bout par Pascal Plante. Obsession, fascination sans limites pour le Mal, voyeurisme… Un dispositif cinématographique aussi froid qu’il est en adéquation avec son sujet. C’est puissant et marquant. L’avenir le placera probablement parmi les chefs-d’œuvre de la décennie. (Notre critique).
2- LE SUCCESSEUR de Xavier Legrand (Belgique/Canada/France)

Après le tétanisant Jusqu’à la garde, le réalisateur Xavier Legrand récidive et ne lâche pas la bride de la tension maximale. Cette histoire d’héritage paternel crispe du début à la fin. C’est exécuté avec une maestria formelle dingue. Encore un uppercut. Un film magistral, qui jongle avec habileté entre les différents aspects de la moralité et creuse les zones d’ombre de l’être humain. (Notre critique).
3- PAUVRES CREATURES de Yorgos Lanthimos (Irlande/Royaume-Uni/USA)

Le nouveau Lanthimos est peut-être l’un de ses plus accessibles. Il n’en est pas moins l’un des plus ludiques, enthousiasmants et excitants. Plastiquement somptueux, Pauvres Créatures est littéralement un film-monde, dont le discours acerbe sur l’émancipation féminine touche au plus juste, porté par des comédiens en état de grâce, et notamment une Emma Stone juste immense. (Notre critique).
4- LA ZONE D’INTERET de Jonathan Glazer (Pologne/Royaume-Uni/USA)

Dispositif de cinéma mécanique, millimétré, glaçant à l’image de son sujet : l’autopsie d’une déshumanisation, la bascule de personnages vers la monstruosité, enfouie derrière l’apparence de la normalité et du quotidien. Glazer donne moins à voir qu’à ressentir. Inconfortable, malaisant, viscéral et pourtant du cinéma nécessaire et imparable. Dix ans après l’éblouissant et hypnotique Under the Skin, Glazer signe un nouveau film majeur qui restera dans l’Histoire du cinéma. (Notre critique).
5- FURIOSA : A MAD MAX SAGA de Georges Miller (Australie/USA)

Un cran au-dessus de Fury Road. Avec ce récit de vengeance, Miller renoue avec une narration plus classique, et surtout avec le premier opus de Mad Max. Il hisse sa science de l’action, du découpage, du rythme et du montage à un niveau encore supérieur. Et en profite pour continuer à questionner la place du mythe dans la tradition orale. Quelle saga !
6- NOSFERATU de Robert Eggers (USA)

C’est visuellement splendide. Robert Eggers livre la version du Nosferatu que l’on attendait de lui. Fasciné par sa créature, au design très particulier, prenant le parti de sexualiser à fond la relation avec Ellen Hutter, Eggers livre une œuvre puissante et enivrante, aux influences picturales très marquées, au rythme (trop) flottant mais qui fascine longtemps, longtemps après la vision. (Notre critique).
7- LONGLEGS de Osgood Perkins (USA)

Malgré une écriture qui toussote par instants, voilà un film de genre qui conjugue l’effroi avec la beauté plastique à un très haut niveau d’exigence. Cette terrifiante traque au serial killer (Cage est parfait) sur fond de croyances sataniques délivre quelques unes des images/scènes les plus effrayantes vues depuis longtemps. Depuis Hérédité ?! Fort possible. Un cauchemar qui infuse doucement mais sûrement… (Notre critique).
8- LA MALEDICTION : L’ORIGINE de Arkasha Stevenson (USA/Italie)

Excellente prequelle qui retrouve la saveur de l’opus original et d’un certain cinéma horrifique des 70’s. Direction artistique, photographie et musique concourent à rendre le film aussi angoissant et malaisant que son sujet diabolique. Arkasha Stevenson y dépeint un milieu de l’église plus horrifique que l’argument surnaturel lui-même. Malgré un scénario relativement convenu, le film creuse un sillon anti conventionnel dans le paysage du film d’horreur javellisé actuel. Nell Tiger Free y est excellente. Une très étonnante réussite.
9- VAMPIRE HUMANISTE CHERCHE SUICIDAIRE CONSENTANT de Ariane Louis-Seize (Canada)

Chouette surprise. Beau petit film à la fois malin, ludique et touchant. Le mythe du vampire revisité pertinemment. Les deux jeunes comédiens sont mortels.
10- LES FANTÔMES de Jonathan Millet (France/Allemagne/Belgique)

Drame d’espionnage qui place l’humain au cœur de son dispositif. Sans artifice ni fioriture. Tension et émotion se mêlent dans une économie de moyens remarquable. Adam Bessa crève l’écran. Impressionnant pour un premier long.
Flop 2024
1- ABIGAIL de Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillett (USA/Irlande)

Si le postulat de base semble ludique et prometteur, force est de constater que Abigail : c’est complètement nul. Et tellement agaçant… Après Scream 5 et 6, il faudrait interdire à Bettinelli-Olpin et Gillett d’approcher toute caméra à l’avenir. Pour le bien du cinéma. Merci. (Notre critique).
2- SOUS LA SEINE de Xavier Gens (France)

On peut légitimement mettre en avant le statut de série B décomplexée et à la crédibilité relative. On peut aussi choisir de voir le verre à moitié plein. Mais force est de constater que Sous la Seine est turbo nul ! Son statut assumé de film d’exploitation, de genre, n’excuse en rien une telle paresse dans l’écriture : personnages catastrophiques, dialogues aberrants, situations invraisemblables… Une enfilade de clichés plus grossière et feignante que volontairement respectueuse du genre. Si on excepte quelques scènes bien emballées, le film est quand même une sacrée purge honteuse par son manque de rigueur dans l’écriture sur à peu près tous les plans. Et se révèle même totalement contreproductif dans son discours sur l’environnement par son excès de débilité profonde. Un comble ! (Notre critique).
3- MENACE EN EAUX PROFONDES de Hayley Easton Street (Royaume-Uni)

Les films de requins c’est comme les kebabs : tu en as très envie, et après tu regrettes. Avec Menace en eaux profondes, on est pourtant dans un représentant pas plus honteux qu’un autre, c’est ultra limité, les personnages sont indigestes, mais le concept, aussi peu crédible soit-il, fonctionne relativement bien. Suivant !
4- LATE NIGHT WITH THE DEVIL de Cameron Cairnes et Colin Cairnes (Australie/USA/Émirats arabes unis)

Concept intriguant (une émission tv des 70’s qui propose un cas de possession en direct) et plutôt bien exploité. Problème : le film ne dépasse jamais son postulat et au final, paraît bien long et ne raconte rien. C’est dommage car David Dastmalchian est excellent et il y avait matière à mieux.
5- JOKER : FOLIE A DEUX de Todd Phillips (USA)

J’avais adoré le premier Joker, film très solide tant dans ses audaces, sa structure, sa narration que ses parti-pris visuels. Tout s’effondre ici. À vouloir embrasser le film de prison, le récit de procès et la comédie musicale, Todd Phillips se rate sur tous les plans. La déconstruction du personnage principal et le détricotage de l’image de révolutionnaire qu’il projette à la fin du précédent opus se heurte à un manque d’inspiration flagrant, à des personnages aux trajectoires et enjeux quasi-nuls. Les scènes chantées tombent continuellement à plat et servent de cache-misère à un scénario inexistant. Il demeure une superbe photographie et une esthétique globalement très réussie. Mais c’est quand même une sacrée déception !

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