[Critique] JESSABELLE de Kevin Greutert

Mine de rien, Blumhouse Productions commence à se forger une belle réputation dans le milieu cinématographique hollywoodien. Si le maître-mot de son fondateur Jason Blum reste : “un budget minimum tu ne dépasseras point”, force est de constater que les productions du bonhomme rapportent généralement (très) gros. Toute considération qualitative mise à part, Blum semble avoir le nez fin même si sa propension à abuser de ses licences à succès (au hasard, Paranormal Activity) le rendent antipathique au possible. Pourtant, ce serait oublier que Blum a mis des billes dans des succès critiques tels que Sinister, Insidious, The Lords of Salem ou encore Oculus. Preuve que son appât du gain n’est pas incompatible avec la qualité du film concerné.
Jessabelle a été réalisé sous l’égide de Blumhouse Productions, mais n’a pas bénéficié de sortie salle en France. Mis en boîte par Kevin Greutert, monteur puis réalisateur des épisodes VI et VII de la saga Saw, le film se veut une petite bande horrifique à suspense, ménageant ses effets et soignant son atmosphère. Surprise : l’ensemble des promesses sont tenues. Le personnage de Jessie, marquée par plusieurs traumatismes et contrainte de revenir dans la demeure familiale, en plein coeur de la Louisiane, là même où sa mère est morte quelques années auparavant, est la porte d’entrée et l’identification du spectateur. Elle est également la promesse d’un film de fantômes comme il en pullule des bobines entières. Avec Jessabelle, il ne faut pas s’attendre à être scotché par un scénario d’une inventivité folle. Ici, tout est ultra classique et balisé.

Malédiction familiale
Néanmoins, que ce soit par son cadre, empli de résonances vaudous, ou par la mise en scène d’un Kevin Greutert qu’on n’attendait pas aussi doué pour emballer des scènes d’angoisse et d’effroi, le film fonctionne. Magnifiquement photographié, doté de teintes automnales du meilleur effet, Jessabelle tient largement la route d’un point de vue technique. Même si son intrigue peine à maintenir l’attention de par sa trop grande proximité avec tant d’autres, force est de constater que certaines scènes scotchent l’esprit et que le fantôme, bien que lorgnant un peu trop du côté des spectres japonais, dispose d’un capital horrifique indéniable. A ce titre, la séquence de la baignoire, pour classique qu’elle soit, est d’une efficacité et d’un jusqu’au boutisme particulièrement réjouissants. Bon point également pour la prestation de l’ensemble des comédiens qui semblent impliqués, à l’image de Sarah Snook, déjà vu à son avantage dans Prédestination des frères Spierig, et qui apporte suffisamment de profondeur à un personnage pourtant bourré de clichés.
Communication d’outre-tombe
Malheureusement, Jessabelle ne s’élève jamais au-delà de son statut de petit film d’horreur bien troussé et sympa. La faute à un manque évident d’ambition et de prise de risques dans son intrigue. Exemple : les scènes de “communication” d’outre-tombe entre la mère défunte et sa fille à plusieurs années d’écart sont intéressantes et prometteuses sur le papier, mais pas assez bien exploitées pour constituer autre chose qu’une grosse ficelle pour alimenter le mystère et faire avancer l’intrigue…
Dans la pelletée de VOD au rayon films de fantômes de bas étage, Jessabelle constitue de toute évidence le haut du panier. Mais si quelques scènes marquent la rétine, pas sûr qu’on se souvienne du film quelques mois après sa vision…
JESSABELLE
Kevin Greutert (USA – 2014)

Genre Horreur – Interprétation Sarah Snook, Mark Weber, David Andrews, Joelle Carter… – Musique Anton Sanko – Durée 90 minutes – Distribué par Metropolitan.
L’histoire : Victime d’un terrible accident, Jessie est de retour dans la maison de son enfance, une demeure isolée dans les bayous de Louisiane. Son père y vit seul depuis le décès de sa mère survenue peu après sa naissance. La jeune femme ne tarde pas à découvrir un mystérieux enregistrement vidéo que sa mère lui a laissé en héritage. Sa découverte et le secret qu’il contient vont provoquer l’ire d’un esprit vaudou que rien ne semble pouvoir arrêter…
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