[Be Kind Rewind] MIRACLE MILE de Steve De Jarnatt (1989)

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En voilà un film pas comme les autres. Miracle Mile ou une bombe qui nous explose littéralement au yeux pendant un sprint haletant d’1h27. Cette pépite sortie tout droit de la tête d’un homme, Steve De Jarnatt, date de 1989 et est ressorti en version restaurée en 2017.
Oubliez les cases, ce film ne rentre dans aucune, ou bien rentre dans toutes. De l’action à la romance en passant par la science-fiction et le thriller apocalyptique, Appel d’Urgence (nom d’exploitation français) est passé inaperçu lors de sa sortie. Le second et dernier film de De Jarnatt s’appuie sur un scénario tenant sur 2 lignes, mais quelles lignes ! Une nuit, après un rendez-vous raté avec la femme de sa vie, un homme reçoit dans une cabine téléphonique l’appel d’un militaire affolé qui lui apprend que des missiles nucléaires vont s’abattre sur Los Angeles dans 1 heure et 10 minutes. Miracle Mile narre donc une nuit de tension, de séparation et de retrouvailles entre la barmaid Julie (Mare Winningham) et l’anthropologue trompettiste de jazz Harry (Anthony Edwards) dans la folie d’un Los Angeles nocturne.

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Un coup de fil et ça s’emballe

Avant même l’élément perturbateur, le réalisateur brouille les pistes et s’amuse. Pendant que l’histoire d’amour entre les deux protagonistes s’entame tranquillement, la musique inquiétante et persistante des synthés nous rappelle que l’on est pas devant n’importe quel film de romance. Là, pour le coup, on est perdu, ne sachant pas où le film veut nous emmener on se laisse pourtant glisser jusqu’au fameux appel, signant, dans un zoom lent mais pesant, le début de l’intrigue et/ou le début des ennuis.
Tel le messie porteur d’un message, Harry s’empresse d’avertir ceux qui sont encore debout à 4h du matin. S’en suit une séquence forte du film alors que celui-ci s’emballe complètement dans un rythme qui ne semble plus s’arrêter ! Le temps presse c’est certain et le film ne manque pas de nous le rappeler. Pour autant, Miracle Mile use brillamment des plans séquences ce qui, à l’inverse d’accélérer le rythme, rendent chaque seconde (de perdue) ou qui passe insoutenable pour le spectateur. Cela accentue cet effet de longueur dans un Los Angeles obscur, désert et dépourvu d’effervescence !
Le crescendo de la menace, du temps qui passe, n’est coupé dans son élan que pour se recentrer sur les personnages de Harry et Julie, aussi bien dans des moments de calme que de stress. Alors que la panique, pour l’instant plutôt contenue, ne semble pas envahir les rues de L.A.. Et pourtant, le film attaque sa partie la plus déstabilisante.

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Le chaos, il y a pas d’autre mot

Le jour s’installe peu à peu, l’information d’une attaque nucléaire fait son chemin tandis que les rues se remplissent petit à petit. Le film le martèle cependant, il peut s’agir d’une rumeur, Harry a peut être mal compris. La question se pose donc tout le long du film. Est-ce que cela va arriver ou non ? Faut-il prendre peur ou garder son calme. Forcé de constater que les habitants de Los Angeles ont clairement fait leur choix. Alors qu’Harry et Julie tentent de sauver leur peau, la population qui les entoure semble devenue folle, complètement déboussolée par la nouvelle (“rumeur”) qui vient de tomber. La panique s’empare de la ville, la chaussée se remplit, les gens perdent le contrôle, les voitures s’entassent, le chaos est total. On n’oublie évidemment pas la recette du film qui consiste à faire monter cette tension ambiante sans jamais s’arrêter, minute après minute pendant qu’Harry se démène pour rester en vie.
Face à cette nouvelle, chacun réagit un peu à sa façon. D’un patron de bar terrifié, concentré et qui avait tout préparé, aux grands parents qui y voient une belle mort, en passant par ceux qui n’y croient pas du tout. Chacun réagit à sa façon, puisqu’après tout il ne s’agit pour l’instant que d’une rumeur. Une rumeur prise immédiatement au sérieux par la majorité des personnages qui ne manquent pas de rapporter ça au contexte de l’époque, que l’on connait bien (même si le film se passe clairement pendant la Guerre Froide). Miracle Mile que l’on pourrait considérer comme simple film d’apocalypse va beaucoup plus loin dans ce sens là. S’interroge sur le fondement d’une pseudo information que l’on divulgue clairement lors d’un flash info à la télé. Allant même plus loin, le film montre avec justesse et brutalité, la folie humaine face à la panique, l’incompréhension et la peur émanant pourtant d’une rumeur.

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Un film d’époque ? Vraiment ?

S’inscrivant pleinement dans le contexte anxiogène de la Guerre Froide, Miracle Mile prend même le temps de placer un détails pas si anodin que cela. Le bar où Julie est serveuse s’appelle le “Fat Boy” en référence aux deux bombes atomiques lancées à Hiroshima et Nagasaki pendant la Seconde Guerre mondiale, surnommées Fat Man et Little Boy. Les réactions des personnages s’inscrivent totalement dans ce contexte, prouvant ainsi le niveau de peur qui pouvait régner chez la population à cette époque. Cependant, à sa sortie, le film n’a pas trouvé son public et la raison semble simple à mes yeux. Paru en salle en 1989, Miracle Mile arrive à la chute du mur de Berlin et du bloc soviétique, rendant les problèmes et questionnements (pourtant primordiaux) qu’il soulève caduques.
En 2018, la résonance du film et les armes nucléaires n’ont pas finies de parler d’elle. Le film se transpose ainsi facilement à notre époque où des hommes comme Donald Trump et Kim Jong Un ont les doigts pointés sur le bouton rouge. Évidemment dystopique, le film s’ancre pourtant parfaitement dans un quotidien qui est le notre. D’un point de vue plus cinématographique, Alerte d’urgence s’appuie sur une imagerie forte et prenante, à la fois chaude et froide, avec des couleurs qui évoluent et ressortent beaucoup vers la fin, vers l’impact. La réalisation use avec parcimonie des plans séquences et des transitions adéquates posant toujours plus le décor, celui d’un tragédie. De plus, côté casting, il n’y à rien à redire. Tous les personnages secondaires ont une force, une personnalité et une puissance. On y trouve une panoplie quasiment complète de la société américaine des eighties. Avec des acteurs au petits oignons qui plus est.
Pour conclure, Miracle Mile est un film puissant et une pépite ça ne fait aucun doute ! Alors qu’il semblait ancré à jamais dans son époque, ses questionnements et ses enjeux surgissent avec autant, si ce n’est plus, de force en 2018. Ce très bon film marque à sa façon une phobie humaine, celle d’un danger que l’on comprendra seulement le jour où on l’aura devant soi…

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MIRACLE MILE
Steve De Jarnatt (USA – 1989)

Note : 4.5Genre Thriller apocalyptique – Interprétation Anthony Edwars, Lou Hancock, Mykelti Williamson, Kelly Jo Minter…
– Durée 87 minutes – Disponible en DVD chez Blaq Out (Page Facebook) depuis le 13 novembre 2017.

L’histoire : Une nuit, après un rendez-vous raté avec Julie, la femme de sa vie, Harry reçoit dans une cabine téléphonique l’appel d’un militaire affolé qui lui apprend que des missiles nucléaires vont s’abattre sur Los Angeles dans 1 heure et 10 minutes.


Critique en partenariat avec Cinetrafic. Retrouvez toutes les sorties ciné de 2018 et le top 50 du film catastrophe sur Cinetrafic.

Par François Hamelin

Rédacteur sur Obsession B. « S’il ne devait y avoir qu’une règle pour me séduire ?… Surprenez moi ! » Voilà comment caractériser ma passion pour le cinéma ! Des films indépendants aux thrillers sombres en passant par les films de science fiction purs et durs et les polars sous acides. C’est simple, tout ce qui a de l’intérêt m’intéresse ! Sur Obsession B, je viendrais parler des pépites comme des blockbusters. Si j’avais un film de chevet ça serait THE THING de John Carpenter, pour m’évader je lance SWISS ARMY MAN sans tarder, j’ai failli arrêter l’école après avoir vu BATTLE ROYALE et oui, j’ai pleuré devant JODOROWSKY’S DUNE !
Contact : fohamelin@gmail.com

2 Comments on [Be Kind Rewind] MIRACLE MILE de Steve De Jarnatt (1989)

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    Thanks !!

    Steve De Jarnatt

    Aimé par 1 personne

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