[Critique] THE CLOVERFIELD PARADOX de Julius Onah

Nouvel opus constitutif de l’univers Cloverfield créé en 2008 par Matt Reeves, Drew Goddard et J.J. Abrams, The Cloverfield Paradox fait suite à 10 Cloverfield Lane, réalisé par Dan Trachtenberg en 2016. Après le found footage en mode invasion de gloumoute géant, puis le huis-clos oppressant, direction l’espace pour ce troisième volet confié cette fois au réalisateur nigério-américain Julius Onah (The Girl Is in Trouble, 2015).
Le concept de l’univers étendu autour de Cloverfield était sacrément enthousiasmant lorsque 10 Cloverfield Lane est venu apporter sa pierre à l’édifice. Ou comment prolonger une histoire et une thématique de manière drastiquement opposée. Du spectaculaire à l’intimiste, c’était le pari on ne plus brillant et réussit par ses concepteurs et donnait tout son sens à un premier épisode plutôt apprécié mais qui n’avait pas su convaincre tout le monde. L’enthousiasme s’enrobait dès lors d’une attente inévitable pour ce qui constituerait la suite du projet… Et 10 Cloverfield Lane avait brillamment transformé l’essai en faisant de l’univers Cloverfield un terreau artistique aussi enthousiasmant que riche de possibilités.
Comme J.J. Abrams est un petit malin, le troisième épisode a déboulé sans prévenir, annoncé à la surprise de tous à l’occasion de la finale du Superbowl en 2018, pour une diffusion quasi instantanée sur la plateforme Netflix. Un coup de com’ majestueux. Tout le monde s’en rappelle. Après, il reste un film, et si l’attente était énorme, le résultat est inversement proportionnel en terme de qualité…

Le vide interstellaire

The Cloverfield Paradox prend tout d’abord ses distances avec la franchise en envoyant illico-presto un groupe de scientifiques issus de différents pays dans une station spatiale en orbite autour de la Terre. L’idée : travailler à créer une source d’énergie destinée à alimenter une planète bleue arrivée au bout de ses ressources. Comme on peut s’y attendre, les choses tournent mal… L’équipage se retrouve perdu dans l’espace, dans ce qui ressemble fort à une dimension parallèle… Et comme si cela ne suffisait pas, des phénomènes particulièrement bizarres viennent troubler la santé mentale de tout ce petit monde.
Ok. Ils nous la jouent Alien, se dit-on dans un premier temps… Ah non, finalement, on serait plus proche de Sunshine… Ah moins que cela ne soit en toute simplicité 2001, L’Odyssée de l’espace… En tout cas, on semble assez éloigné de Cloverfield, mais pourquoi pas… On ne va pas tourner autour du pot (d’autant que les avis sur le film ont déjà pullulé suite à sa diffusion sur Netflix) : The Cloverfield Paradox est une bonne grosse flatulence prétentieuse et ratée envoyée au nez du spectateur. Après un premier quart d’heure encourageant, le film de Julius Onah délivre son message : du vide. Du vide interstellaire, mais du vide quand même !
Qu’est ce qui ne fonctionne pas dans ce paradoxe filmique ? Presque tout. Filmé avec l’emphase et l’ambition visuelle dignes d’un téléfilm américain des 90’s, The Cloverfield Paradox aggrave son cas avec un scénario imbitable, marqué tout de même par une forme d’audace moisie que l’on aura tôt fait d’assimiler à une prétention assez indescriptible. Là où les deux premiers opus jouaient la carte de l’efficacité et de l’intelligence de propos dans leur approche du film de monstre et du thriller en huis-clos, ce troisième volet se vautre littéralement dans des considérations de paradoxe dimensionnel sans en avoir ni les outils scénaristiques adéquats, ni le talent dans la forme.

Une greffe opportuniste

Pourtant doté d’un casting honnête avec notamment Gugu Mbatha-Raw, Daniel Brühl, Zhang Ziyi, le film foire totalement à les faire exister, rendant certains personnages antipathiques (méchant Aksel Hennie et Chris O’Dowd, le trublion de la bande). Dans ses moments d’émotion, de tension (!), de comédie, The Cloverfield Paradox se plante à tous les coups et ses 100 minutes sont d’une longueur telle que les quelques péripéties vues et revues des centaines de fois (la sortie dans l’espace, le sacrifice d’un personnage principal…) font plus de peine que passer la pilule. Sans aucune personnalité, le film a le cul entre une tripotée de chaises. A sauver ? Des effets spéciaux plutôt excellents et quelques plans dans l’espace réussis. C’est maigre…
Et Cloverfield dans tout ça ? Le postulat initial dévoilant les raisons pour lesquelles les Golgoths de l’espace débarquent sur Terre vaut ce qu’il vaut, mais pourquoi pas. Le problème étant qu’il s’agit juste d’un “raccrochage” brutal et artificiel au concept créé par Abrams, Goddard et Reeves, avec des ficelles grosses comme des parpaings. Voilà, on a l’air fin avec nos attentes enthousiastes. Et c’est, au final, peut-être le pire dans ce projet : avoir greffé la franchise sur ce script indigent et initialement totalement étranger datant de 2012. Une affaire opportuniste transcendée par sa présentation en grande pompe au Superbowl. Et surtout une sortie de route majeure pour un J.J. Abrams (quoi qu’on pense du réalisateur-auteur-producteur), qu’on a connu bien plus pertinent dans ses choix artistiques.


THE CLOVERFIELD PARADOX
Julius Onah (USA – 2018)

Genre Science-Fiction – Interprétation Gugu Mbatha-Raw, David Oyelowo, Daniel Brühl, Zhang Ziyi, Elizabeth Debicki… – Musique Bear McCreary – Durée 101 minutes. Distribué par Paramount pictures (6 février 2019).

L’histoire : Après un accident avec un accélérateur à particules, une station spatiale américaine découvre que la Terre a disparu. Les résidents de la station vont alors être confrontés à l’étrange présence d’une autre station spatiale tout près de leur position.


Le Blu-ray de Paramount Pictures

Technique : ★★★★☆ 
Interactivité : ★★☆☆☆

Paramount Pictures nous gratifie d’un Blu-ray doté d’une image proprement hallucinante. Absolument splendide dans son niveau de détail, son piqué, ses contrastes, ses noirs très denses et ses innombrables touches lumineuses aux quatre coins de l’écran. Une définition au top qui vient paradoxalement souligner l’absence d’envergure de la mise en scène.
La version originale est disponible en Dolby Atmos 7.1 pour les équipements adaptés. Elle fait également bien le job dans sa configuration 5.1, avec une répartition des sons hyper efficace, dans tous les sens, l’ensemble des enceintes sont mises à contribution, y compris le caisson de basses qui gronde régulièrement, ce qui fait bien plaisir et contribue à créer une réelle immersion dans le film. Les dialogues sont quant à eux clairs et précis.
Un making of fait intervenir le réalisateur, les comédiens et bon nombre de membres de l’équipe technique. Tous sont persuadés d’avoir offert un film-clé dans l’histoire de la science-fiction. Sincère ou pas, le tout est d’une naïveté confondante. Le second module est consacré aux personnages et au casting. Le fond est redondant, toujours aussi perché et éminemment commercial.

Par Nicolas Mouchel

Créateur d'Obsession B. Journaliste en presse écrite et passionné de cinéma de genre, particulièrement friand des œuvres de Brian De Palma, Roman Polanski, John Carpenter, David Cronenberg et consorts… Pas insensible à la folie et l’inventivité des cinéastes asiatiques, Tsui Hark en tête de liste… Que du classique en résumé. Les bases. Normal.
Contact : niko.mouchel@gmail.com

2 Comments on [Critique] THE CLOVERFIELD PARADOX de Julius Onah

  1. Une fois n’est pas coutume : je ne suis pas du tout d’accord…
    J’ai trouvé ça très amusant pour ma part.

    J’aime

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