[Critique] MERMAID – LE LAC DES ÂMES PERDUES de Svyatoslav Podgaevskiy

Dans sa boulimie actuelle de pondre du blockbusters et du film de genre, le cinéma russe tourne à plein régime. C’est assez rarement original, pas du tout défricheur et audacieux, mais ça a le mérite d’être efficace dans l’entreprise de recyclage des grandes formules et composantes du cinéma américain. Avec Mermaid, le lac des âmes perdues, film horrifique qui n’aurait pas dépareillé sous la bannière Blumhouse Productions, l’équation ne change pas d’un iota.
On y suit un jeune homme, Roman, tombant malencontreusement sur une mystérieuse créature ayant les traits d’une jolie femme. Une rencontre qui déclenche chez lui une série de visions et d’apparitions cauchemardesques, jusqu’à en impacter sa santé mentale, ses relations avec sa petite amie et ses proches. Une énième histoire de malédiction donc, qui met cette fois en avant la figure de la sirène. Si on n’est pas surpris de retrouver ce mythe au sein d’un cinéma russe ayant une certaine appétence pour les légendes et mystères du folklore, la nature de la créature reste malgré tout assez vaguement identifiable. Indéniablement liée à l’élément eau et hypnotisant ses victimes pour mieux les posséder, elle peut davantage être associée à un fantôme.
Plus qu’une sirène, s’il y a bien une figure qu’évoque la créature maléfique de Mermaid, le lac des âmes perdues, c’est plutôt le personnage de Sadako dans la saga Ring. Tout d’abord dans l’allure générale, avec ses cheveux gras envahissants, élément qui, cependant, n’est pas totalement gratuit et dispose d’une véritable légitimité scénaristique. On retrouve également dans le film la notion de propagation du mal telle une malédiction, voire une maladie dans le cas présent, comme développée dans le chef d’oeuvre d’Hideo Nakata et ses suites/adaptations (dans une moindre mesure). Parti de là, le film de Svyatoslav Podgaevskiy emprunte les rails du ride horrifique attendu sans jamais en dévier, fort de jump-scares en pagailles, d’apparitions soudaines et de visions horrifiques non moins fugaces.

Suspense à marée basse

Techniquement parlant, Mermaid, le lac des âmes perdues n’a pas à rougir de sa facture visuelle, la photographie d’Anton Zenkovich apporte un véritable cachet, avec ses jeux de lumières, ses teintes verdâtres qui ne sont pas sans évoquer les films de Carot et Jeunet ou encore plus récemment La Forme de l’eau de Guillermo Del Toro, et des cadrages plutôt soignés et bien vus dans l’ensemble. Le film de Svyatoslav Podgaevskiy est plutôt béton sur ce point. Mais pour adhérer à ce Mermaid, le lac des âmes perdues, il ne faudra pas être trop regardant sur l’originalité et espérer être surpris. Constamment balisée, l’intrigue n’échappe pas au piège de la redite, et force est de constater que le film ne se révèle pas des plus passionnant dans son schéma générique hérité du film d’horreur anglo-saxon. Il est porté par de jeunes acteurs visiblement convaincus mais finalement assez peu charismatiques, notamment Viktoriya Glukhikh, déjà à l’affiche du gothique The Bride, précédent film du réalisateur. L’ensemble se suit sans trop de déplaisir mais sans réelle conviction non plus, au rythme de scènes d’effroi qui se reposent un peu trop sur les jump-scares pour être honnêtes, laissant de côté toute montée du suspense, pour une tension au demeurant assez faiblarde. Le dénouement, son âme damnée et sa malédiction familiale, ne surprendront pas non plus les spectateurs rompus au genre. Néanmoins, Mermaid, le lac des âmes perdues n’est pas un mauvais film en soi, juste une série B techniquement très correcte, mais dont les péripéties et le discours usés jusqu’à la corde finissent par lasser.


MERMAID – LE LAC DES ÂMES PERDUES
Svyatoslav Podgaevskiy (Russie – 2018)

Genre Horreur – Interprétation Efim Petrunin, Sofia Shidlovskaya, Nikita Elenev… – Musique Aleksandr Maev – Durée 85 minutes. Distribué par Wild Side Vidéo (6 février 2019).

L’histoire : Alors qu’il profite d’une baignade nocturne dans un lac, Roman fait la connaissance d’une étrange inconnue qui cherche pourtant à le séduire. Depuis cette rencontre, le jeune homme semble avoir contracté une maladie rare et des évènements surnaturels liés à une légende familiale font leur apparition. Sa fiancée Marina va tout faire pour le libérer de cette malédiction ancestrale. Son amour sera-t-il assez fort pour le sauver ?


L’édition de Wild Side

Technique : ★★★★☆
Interactivité : ☆☆☆☆☆

Technique
Grosse satisfaction du film, le traitement de l’image est également l’un des points forts de cette édition distribuée en France par Wild Side. Doté d’une belle luminosité, la copie proposée surprend d’autant plus par la qualité de ses contrastes, dans les nombreuses scènes les plus sombres du film, en nocturne ou avec des éclairages diffus comme l’usage des bougies, que dans son piqué précis et le niveau de détails assez poussé de l’ensemble.
Les deux pistes son proposées, version russe et française, toutes deux en 5.1 DTS-HD Master Audio, sont remarquables de dynamisme et d’efficacité. Elles mettent bien valeur les dialogues, toujours très clairs, et les moments de sursaut liés aux apparitions et autres jump-scares. Belle immersion.

En revanche, zéro interactivité proposée.

Par Nicolas Mouchel

Créateur d'Obsession B. Journaliste en presse écrite et passionné de cinéma de genre, particulièrement friand des œuvres de Brian De Palma, Roman Polanski, John Carpenter, David Cronenberg et consorts… Pas insensible à la folie et l’inventivité des cinéastes asiatiques, Tsui Hark en tête de liste… Que du classique en résumé. Les bases. Normal.
Contact : niko.mouchel@gmail.com

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