[Be Kind Rewind] HALLOWEEN 2 de Rick Rosenthal (1981)

Au début des années 80, les suites et autres séquelles de succès cinématographiques n’étaient pas encore monnaie courante. On ne se situe pas encore dans l’excès de la duplication plus opportuniste que véritablement artistique (une exception parmi d’autres : Le Parrain 2 de Francis Ford Coppola), à l’opposé de ce que l’on peut constater actuellement dans l’industrie : surenchère et surabondance de films, à grand renfort de dupliquas de formules éprouvées ou non. La tendance commence néanmoins à se développer de manière significative et donne lieu à quelques exemples de continuité d’univers de premier plan qui marqueront l’histoire du cinéma comme Aliens, Le retour de James Cameron ou Mad Max 2 de George Miller.
En 1978, dans la foulée de la sortie d’Halloween de John Carpenter et de son succès surprise et colossal, la tentation de donner une suite devient une évidence. Et après bien des tergiversations sur le degré d’implication de Big John dans le projet, la possibilité d’engager Tommy Lee Wallace (directeur artistique sur le premier opus) au poste de réalisateur, Halloween 2 est bel et bien mis en chantier et débarque sur les écrans en 1981, dirigé par le nouveau venu Rick Rosenthal, mais supervisé de près par Carpenter. Une séquelle, oui, mais comment ? Le scénario cosigné par Carpenter et Debra Hill prend dès le départ la bonne direction en s’inscrivant dans la continuité immédiate du premier opus, au sein de la même nuit meurtrière du 31 octobre 1978 à Haddonfield, alors que Laurie Strode est conduite à l’hôpital, que Michael Myers court toujours et que le docteur Loomis le traque sans relâche. Ce lien immédiat avec l’oeuvre séminale de John Carpenter, aussi pertinent qu’il soit, n’est pas que temporel. Rick Rosenthal (et Carpenter pour la direction générale et quelques reshoots) se coule à merveille dans le style d’Halloween premier du nom, prolongeant avec application et déférence les efforts de mise en scène si caractéristiques de son prédécesseur. Cadres finement composés dans un format 2.35 ultra large, mouvements de caméras feutrés à la steadycam, jeu sur le hors-champ : la recette est toujours là et fonctionne à merveille. Le tout enrobé de la musique synthétique composée par Carpenter et retouchée par Alan Howarth.

Violence graphique accrue

Prolongeant l’intrigue et l’univers créés par John Carpenter, Halloween 2 n’en oublie pas pour autant d’affirmer sa propre personnalité. Ainsi, ce deuxième chapitre s’affranchit de la relative « timidité graphique » de son modèle en ce qui concerne la représentation graphique de la violence et le ludisme des scènes de meurtre. Michael Myers, qui traque Laurie Strode jusque dans un hôpital qui servira de toile de fond pour une bonne partie du film, se montre moins hésitant à semer les cadavres derrière lui, et s’applique avec davantage de générosité à multiplier les mises à mort : victimes poignardée, étranglée, ébouillantée, ligotée puis vidées de son sang, éborgnée par une seringue… Dans un esprit proche des délires baroques visuels du giallo par instants, Rosenthal donne à voir davantage que Carpenter, sans non plus franchir la ligne rouge du grand guignol exacerbé et livre une copie extrêmement soignée, sans temps mort. Si certains personnages secondaires (les ambulanciers notamment) ne brillent pas par leur pertinence, que Laurie Strode (Jamie Lee Curtis de retour avec une belle perruque) passe une bonne partie du film en arrière-plan (ce qui n’est pas choquant vu l’état du personnage), on ne peut qu’admettre que cet Halloween 2 est, sans conteste, un film d’horreur très solide, brillamment mis en scène, respectueux de son modèle et la suite la plus réussie de la longue saga mettant en scène Michael Myers (les deux opus de Rob Zombie mis à part). D’ailleurs, Carpenter avait décidé d’en finir avec son croquemitaine dès l’issue de cette séquelle, puisque le troisième chapitre, réalisé cette-fois par Tommy Lee Wallace (le téléfilm « Il » est revenu) ne concernera pas Myers. Mais l’appel du tiroir caisse en a décidé autrement… pour de nombreuses années… Quant à Rosenthal, il ne confirmera pas l’essai et participera à la longue agonie de la série en 2002 avec le calamiteux Halloween : Résurrection

Note : 4 sur 5.
HALLOWEEN 2
Rick Rosenthal (USA – 1981)
Genre Horreur – Avec Jamie Lee Curtis, Donald Pleasence, Dick Warlock, Lance Guest, Pamela Susan Shoop, Hunter Von Leer… – Musique John Carpenter et Alan Howarth – Durée 92 minutes. Distribué par Le Chat qui Fume (1er janvier 2020).

Synopsis : Michael Myers n’est pas mort ! Les six balles tirées par le Dr Loomis n’ont pas suffi à arrêter le tueur, qui poursuit son but : retrouver et supprimer Laurie Strode. Blessée et choquée, la jeune femme, transportée à l’hôpital de Haddonfield, est loin de se douter que Myers est encore à ses trousses, laissant toujours plus de cadavres dans son sillage, tandis que Samuel Loomis traque sans relâche son ancien patient…

L’édition Blu-ray du CHAT QUI FUME

Technique

Note : 5 sur 5.

Encore une très belle édition que l’on doit aux bons soins du Chat qui fume. Oubliées les DVD français médiocres du passé, l’image restaurée présentée sur le Blu-ray est réellement impeccable. Dotée d’un très beau piqué et de contrastes bien marqués, cette édition d’Halloween 2 offre une définition de très haut niveau, donnant ainsi l’opportunité de redécouvrir le film sous son meilleur jour et il le mérite !
Côté son, la piste anglaise en DTS 5.1 a elle aussi bénéficié d’un très beau travail de restauration et s’avère ultra dynamique et d’une amplitude appréciable. La musique y trouve une place de choix. A noter que deux autres pistes (anglaise et française) sont au menu, en DTS 2.0. Moins amples que la précédente, elles restent néanmoins fortement recommandables.

Interactivité

Note : 4 sur 5.

Parmi les intervenants que l’on a l’habitude de côtoyer dans les éditions du Chat qui Fume, Eric Peretti, programmateur du Lausanne Underground Film and Music Festival, fait parti des habitués. En une trentaine de minutes, il passe en revue la conception du projet Halloween 2, des interrogations initiales, notamment sur l’identité du réalisateur, les problèmes de continuité avec l’opus original (la merveilleuse perruque de Jamie Lee Curtis), l’influence de Carpenter sur le film fini, etc… C’est souvent très intéressant, même si, comme à chaque fois, la forme de l’intervention face caméra pourra rebuter par son austérité.
Autre morceau de choix de cette édition, la présence d’un making-of de 45 minutes faisant intervenir les principaux protagonistes du projet : casting, producteur, réalisateur, musicien… Avec une franchise plutôt inhabituelle dans ce type d’exercice, ils reviennent sur le tournage de cette séquelle, à grand renfort d’anecdotes (mention spéciale à Lance Guest). On notera néanmoins (sans surprise) l’absence remarquée de John Carpenter…
Enfin, des scènes coupées et une fin inédite assez anecdotiques, mais qui ont le mérite d’être là, sont proposées en plus des bande-annonces des prochaines sorties de l’éditeur.

Par Nicolas Mouchel

Créateur d'Obsession B. Journaliste en presse écrite et passionné de cinéma de genre, particulièrement friand des œuvres de Brian De Palma, Roman Polanski, John Carpenter, David Cronenberg et consorts… Pas insensible à la folie et l’inventivité des cinéastes asiatiques, Tsui Hark en tête de liste… Que du classique en résumé. Les bases. Normal.
Contact : niko.mouchel@gmail.com

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