[Be Kind Rewind] SIGNAL, UNE AVENTURE DANS L’ESPACE de Gottfried Kolditz (1970)

1960… Alors que l’Allemagne de l’Est se lance dans la production de film de science-fiction avec le très bon L’Étoile du silence, sous l’égide du prolifique studio Deutsche Film AG (DEFA) et ses 700 longs-métrages en 50 ans, le succès du film de Kurt Maetzig ne suffit pas à lancer la machine puisqu’il faut pourtant attendre près de dix ans pour qu’un second opus du genre soit mis sur les rails. Cette fois, la DEFA oeuvre en partenariat avec le studio polonais PRF Zespol Filmowy pour accoucher de Signal, une aventure dans l’espace réalisé par Gottfried Kolditz, qui sort sur les écrans en 1970.
Avec Signal, le studio allemand propose un film qui se démarque néanmoins notablement de son prédécesseur, même s’il présente certaines connexions avec lui. Il est là aussi question d’une mission de sauvetage tentant de retrouver un équipage perdu dans l’espace et d’un étrange signal d’origine inconnue. On retrouve également le caractère ouvertement cosmopolite du groupe participant à la mission et une même vision de l’exploration spatiale quelque peu naïve. Mais les points communs s’arrêtent bien là, car les deux films se révèlent au final bien différents, s’engageant dans deux directions relativement opposées. Déjà, l’omniprésence des orientations communistes envahissantes de L’Etoile du silence, film ouvertement politisé, sont ici plus discrètes, bien que jamais très loin… Le discours de ce nouveau film siglé SF de la DEFA y est nettement moins lourdaud, reléguant son approche politique au second plan pour y développer un aspect plus métaphysique, comme peut l’être sa principale source d’influence : 2001, L’Odyssée de l’espace sorti deux ans auparavant.

L’influence de Kubrick

Le film de Stanley Kubrick sert de toute évidence de matrice à ce Signal, inspiré pourtant du roman Asteroidenjaeger de Carlos Rasch. Sans s’engager aussi loin dans les délires spatio/philosophico/métaphysiques que son modèle, Signal pourrait apparaître comme une démarcation light de 2001, que d’aucuns pourraient même trouver plus digeste que le monument de Kubrick. Le réalisateur Gottfried Kolditz s’attache à multiplier les scènes où les personnages évoluent en apesanteur, se mouvant dans le vaisseau, au rythme de l’excellente musique signée Karl-Ernst Sasse, conviant nappes électroniques et morceaux classiques. Des séquences hypnotisantes et plus contemplatives qu’autre chose, souvent calquées sur celles de 2001… en reprenant les mouvements de caméra circulaires et les cadrages, frôlant l’abstraction à certains moments. Appliqué, Gottfried Kolditz soigne au maximum sa mise en scène et ses plans, proposant un cachet visuel indéniable à son film. Il est bien aidé en cela par des effets spéciaux, costumes et décors qui tiennent encore extrêmement bien la route. Quoi qu’on pense de ces deux films de SF germano-polonais old school, leur générosité en terme de direction artistique (remises dans leur contexte de leur époque évidemment !) reste à souligner. Et cerise sur le gâteau, Signal se démarque un peu plus encore et affirme son identité lorsqu’il se permet de sortir de son chapeau en plein milieu de métrage une séquence en animation, sans prévenir, comme un goût avant-gardiste qui fait bien plaisir. 
Le rythme languissant et l’absence de scènes d’actions pourra rebuter, et même si on pourra toujours lui reprocher certains moments à la limite du génant (les scènes sur la plage, l’interprétation générale), Signal dispose d’un charme indéniable, le situant dans un registre différent de L’Etoile du silence. De quoi offrir, au final, un dyptique fort intéressant pour les amateurs (curieux) de science-fiction.

Note : 3 sur 5.
SIGNAL, UNE AVENTURE DANS L’ESPACE
Gottfried Kolditz (Allemagne de l’Est/Pologne – 1970)
Genre Science-fiction – Avec Piotr Pawlowski, Evgeniy Zharikov, Gojko Mitic, Alfred Müller… – Musique Karl-Ernst Sasse – Durée 87 minutes. Distribué par Artus Films (2 juin 2020).
Synopsis : Au XXIe siècle, le vaisseau spatial Ikarios mesure le vide intergalactique aux limites du système solaire. Mais une pluie d’astéroïdes s’abat sur le vaisseau, le privant de toute communication avec la Terre. Au sol, les scientifiques s’inquiètent de leur silence quand leurs ordinateurs interceptent un étrange signal. Provient-il du vaisseau ou bien est-il d’origine extraterrestre ? Ils envoient alors une sonde pour tenter de retrouver l’équipage.

L’édition DVD d’ARTUS FILMS

Technique

Note : 3 sur 5.

Le master 2K proposé pour cette édition DVD est d’excellente tenue, assurant une très belle image, nette et globalement assez propre, malgré la présence en milieu de métrage d’un artefact persistant durant quelques minutes en bord d’écran. Les couleurs sont dans l’ensemble resplendissantes, même si elles souffrent d’instabilité sur certaines scènes. 
Côté son, le film propose deux pistes en Dolby Digital 2.0 d’excellente facture. Les voix sont claires, bien détachées, mention pour une fois au doublage de la version française qui s’en sort très bien. A noter quelques décrochages en VF, de courts passages restés dans la langue de Goethe.

Interactivité

Note : 3 sur 5.

Côté bonus, la parole est donnée à Christian Lucas, de la chaîne YouTube “Ciné Forever Vidéo”, dans la continuité de son intervention sur le DVD de L’Etoile du silence. Dans un module de 13 minutes, il évoque le contexte de production de Signal, très différent de celui de son prédécesseur, et ses grands thèmes, sans oublier d’aborder les liens évidents avec 2011, L’Odyssée de l’espace. Un diaporama d’affiches et de photos du films, la bande-annonce originale et celles des autres films de la collection “SF Vintage” d’Artus Films complètent l’interactivité.

Par Nicolas Mouchel

Créateur d'Obsession B. Journaliste en presse écrite et passionné de cinéma de genre, particulièrement friand des œuvres de Brian De Palma, Roman Polanski, John Carpenter, David Cronenberg et consorts… Pas insensible à la folie et l’inventivité des cinéastes asiatiques, Tsui Hark en tête de liste… Que du classique en résumé. Les bases. Normal.
Contact : niko.mouchel@gmail.com

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