[Critique] THE DARK KNIGHT RISES de Christopher Nolan

Le chant du cygne...

Clap de fin pour la trilogie de Christopher Nolan avec ce Dark Night Rises. Un troisième volet des aventures de Batman qui s’inscrit logiquement et de manière très cohérente dans la vision foncièrement noire et pessimiste que le cinéaste britannique avait jusqu’alors porté sur le super-héros masqué. Un film dense, verbeux, aux personnages forts, aux trajectoires inattendues, aux thématiques nombreuses et passionnantes. En un mot : MONUMENTAL !

La fin du précédent opus avait laissé le chevalier noir en fuite de Gotham, ville pourrie par la corruption et le banditisme. Batman était poussé à l’exil suite au choix lourd de conséquence d’assumer la totale responsabilité des meurtres commis par le procureur Harvey Dent, aka Double-Face qui, dans sa lutte contre le crime, avait tutoyé le mal d’un peu trop près. Dès lors, Batman avait sacrifié son image, son symbole, endossant le rôle du bourreau, pour permettre à la cité et à ses citoyens de sortir de la folie criminelle. Un rappel pas superflu pour appréhender comme il se doit cette suite. Car le geste de Batman a porté ses fruits. Gotham est, à l’entame de ce troisième épisode, débarrassé de la criminalité qui l’a rongé. La mémoire d’Harvey Dent est porté aux nues, le défunt procureur a endossé le rôle du sauveur. De son côté, Bruce Wayne s’est retiré des affaires, vivant en ermite dans son manoir, ruminant la perte de Rachel Dawes et reléguant le costume de Batman au rang des souvenirs poussiéreux. Passé du statut de symbole de la justice à celui de hors-la-loi, il va falloir pour Wayne/Batman reprendre du service, car le mal resurgit, sous les traits et les biceps d’un colosse impitoyable nommé Bane.

Figure du mal

La ligne directrice de Christopher Nolan semble clair pour ce Dark Knight Rises. La trajectoire de Batman n’est pas achevée. Celle de Wayne non plus d’ailleurs, car l’homme est devenu une épave, physiquement diminué, l’ombre de lui-même. L’arrivée de Bane, surgit tout droit des égouts, prouvant que le mal n’a jamais été réellement éradiqué, mais qu’il s’est développé à l’abri des regards, va tout remettre en question. Car ce nouveau bad guy ne fait pas dans la dentelle. Après le sous-exploité Epouvantail/Jonathan Crane de Batman Begins (qui fait un amusant retour dans ce troisième volet), l’inoubliable Joker et l’ambivalent Harvey Dent/Double Face de Dark Knight, Bane était fortement attendu et s’impose clairement comme une nouvelle figure du mal « Nolanien ». Un colosse, brute épaisse dont le masque ne laisse découvrir qu’une partie du visage. La performance de Tom Hardy, qui a clairement enflé musculairement pour le rôle, est étonnante, puisque tout son jeu passe par le regard, la gestuelle et la voix. Sa prestation apporte une épaisseur inattendue au personnage. Sa motivation : précipiter Gotham dans le chaos le plus total. La dernière partie du film bascule ainsi dans un hallucinant contexte de guerre civile, une ambiance étonnamment noire pour ce type de superproduction. Mais rien de surprenant au final, tant tout ce qui a précédé dans le cheminement du Dark Knight de Nolan semblait conduire tout droit vers cette issue. On pourra d’ailleurs évidemment y voir un sous texte social alimenté une fois encore par les conséquences et fantômes du 11 septembre 2001. Le cinéaste et ses scénaristes se permettent d’explorer la chute d’un microcosme brinquebalant (Gotham) par un virus venant parasiter ses règles et ses lois de l’intérieur (Bane).

Retrouver la lumière

Pour Batman, il va falloir accepter à nouveau la lumière des projecteurs, et endosser une fois encore le costume du justicier, pour renverser la menace Bane. Embrasser l’image du sauveur, aux yeux d’une population qui a été dupée. La métaphore du retour à la lumière est d’ailleurs clairement exploitée quand Wayne, prisonnier d’une geôle souterraine, doit littéralement faire renaître et affronter sa peur pour s’en extraire et retrouver la lumière. Il y a beaucoup à dire sur ce nouveau Batman. La richesse de ses personnages : Selina Kyle tout d’abord, qu’Anne Hathaway, dans un registre différent de celui de Michelle Pfeiffer dans l’épisode burtonien Batman Returns, interprète avec conviction et propose une Catwoman séduisante, même si elle aurait méritée qu’on s’intéresse davantage à son sort. Le flic John Blake ensuite, et la révélation finale le concernant, ses scènes d’actions en net progrès (la séquence d’ouverture, les poursuites motorisées grisantes), la musique martiale omniprésente et enveloppante de Hans Zimmer, une conclusion totalement jouissive et ouverte… mais également les faiblesses d’écriture (les personnages de Marion Cotillard et Matthew Modine), quelques ellipses et facilités scénaristiques douteuses… Mais il y a également cette maîtrise du cinéaste qui, au-delà des compromis (car il y en a incontestablement), impose plus qu’un film de super-héros, puisque sa trilogie va bien au-delà d’une série comic-books. Dans ce sens, cet ultime opus plonge encore davantage dans une forme de réalisme déroutante pour ce style de projet. Certes, The Dark Knight Rises est peut-être un ton en dessous de son presque parfait prédécesseur… Il n’empêche qu’il reste une oeuvre d’une telle richesse, d’une telle intensité, qu’il se hisse sans problème parmi les plus grand films du genre et boucle la boucle d’une trilogie s’imposant comme essentielle. 


THE DARK KNIGHT RISES
Christopher Nolan (USA – 2012)

Note : 4Genre Action – Interprétation Christian Bale, Anne Hathaway, Tom Hardy, Gary Oldman, Joseph Gordon-Levitt, Marion Cotillard… Musique Hans Zimmer – Durée 165 minutes. Sortie le 25 juillet 2012.

L’histoire : Il y a huit ans, Batman a disparu dans la nuit : lui qui était un héros est alors devenu un fugitif. S’accusant de la mort du procureur-adjoint Harvey Dent, le Chevalier Noir a tout sacrifié au nom de ce que le commissaire Gordon et lui-même considéraient être une noble cause. Et leurs actions conjointes se sont avérées efficaces pour un temps puisque la criminalité a été éradiquée à Gotham City. Mais l’arrivée à Gotham de Bane, terroriste masqué, compte bien arracher Bruce à l’exil qu’il s’est imposé…

Par Nicolas Mouchel

Créateur d'Obsession B. Journaliste en presse écrite et passionné de cinéma de genre, particulièrement friand des œuvres de Brian De Palma, Roman Polanski, John Carpenter, David Cronenberg et consorts… Pas insensible à la folie et l’inventivité des cinéastes asiatiques, Tsui Hark en tête de liste… Que du classique en résumé. Les bases. Normal.
Contact : niko.mouchel@gmail.com

2 Comments on [Critique] THE DARK KNIGHT RISES de Christopher Nolan

  1. N’ayant toujours pas vu le film et malgré toutes les précautions (pas vu d’extrait, de bande annonce, lu de critique…) je connais déjà 3 spoils…
    Je vais donc ne pas lire ton article et attendre la sortie du BR 😉

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  2. je pense que tu fais bien… je me suis laissé aller furieusement sur les spoils me semble-t-il… 😉

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