[Critique] THE BODY d’Oriol Paulo

La mécanique du corps

Prix du meilleur film décerné par le jury de la compétition internationale de la seconde édition du PIFFF, The Body de l’Espagnol Oriol Paulo a brillé de toutes ses qualités au sein d’une sélection de films en compétition plutôt moyens. Co-scénariste du déjà brillant Les Yeux de Julia de Guillem Morales, Oriol Paulo signe ici son premier long-métrage avec une maîtrise assez hallucinante pour un galop d’essai. Véritable “film de scénariste” dans le bon sens du terme, The Body est d’abord une grande réussite de par son intrigue vertigineuse, bardée de faux-semblants, de personnages manipulateurs, de retournements de situations… Conçue, selon Oriol Paulo lui-même, comme un hommage au travail d’Hitchcock et de Clouzot, cette histoire de cadavre disparu marche dignement dans les pas de ses illustres prédécesseurs. Le jeune cinéaste espagnol prouve avec ce film qu’il a clairement absorbé toutes ses influences pour en tirer le meilleur parti, et surtout, rendre une copie cohérente et efficace du thème de la machination au cinéma. The Body fonctionne à plein régime grâce à un contenu absolument juste et équilibré comme il se doit pour que toute séquence, même la plus casse-gueule qui soit (le récit du gardien de nuit sur la disparition du corps, les scènes lacrymales) fonctionne complètement en convoquant toute l’intelligence du spectateur. Le film en impose également dans le déroulé d’une narration qui progresse de révélation en révélation, suivant un rythme infernal (et en quasi temps réel) à l’aide de flash-backs intelligemment intégrés, jusqu’à un double twist final très très délicat à faire gober au spectateur. Et pourtant, ça marche.

Mécanique implacable

Car le scénariste Oriol Paulo n’a pas oublié d’être également cinéaste et brillant directeur d’acteurs. Il n’y a pas de secret. Sur un plan strictement visuel, The Body est un (premier) film qui en impose. Sans fioriture, mais avec un sens du cadre, de la lumière et du montage qui en font un bijou de mise en scène. Le film bénéficie par ailleurs de tout le savoir-faire des techniciens espagnols en terme de films de genre, avec notamment la participation du chef opérateur Oscar Faura (L’Orphelinat, Darkness, Abandonnée…) Des techniciens chevronnés, mais également des comédiens tout bonnement magnifiques. La distribution est dominée par la sublime Belen Rueda, qui, dans un rôle de fantôme/femme fatale/manipulatrice, offre de nouveaux émois aux cinéphiles après Les Yeux de Julia. Face à elle, Hugo Silva impressionne dans sa lente descente aux enfers, transposant son habile composition de comédien à son personnage, tout comme le confirmé José Coronado, dans un rôle de flic veuf bouffé par la vie, classique, et pourtant touchant. Aux frontières du fantastique, The Body demeure un petit bijou de thriller, dont le classicisme mécanique implacable et assumé est proportionnel au bonheur jouissif qu’il procure au spectateur. Oriol Paulo, un jeune cinéaste espagnol à suivre… Encore un !

THE BODY (El Cuerpo). D’Oriol Paulo (Espagne – 2012).
Genre : Thriller. Scénario : Oriol Paulo et Lara Sendim. Interprétation : Belén Rueda, Hugo Silva, José Coronado, Aura Garrido… Musique : Sergio Moure de Oteyza. Durée : 107 minutes. Distribué en VOD (14 août 2017).

Par Nicolas Mouchel

Créateur d'Obsession B. Journaliste en presse écrite et passionné de cinéma de genre, particulièrement friand des œuvres de Brian De Palma, Roman Polanski, John Carpenter, David Cronenberg et consorts… Pas insensible à la folie et l’inventivité des cinéastes asiatiques, Tsui Hark en tête de liste… Que du classique en résumé. Les bases. Normal.
Contact : niko.mouchel@gmail.com

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