[Critique] MASSACRE A LA TRONCONNEUSE 3D de John Luessenhop
Il y a quelque chose de pourri au Texas...
Nouvelle démarcation du chef d’œuvre indéboulonnable de Tobe Hooper en 1974, Massacre à la Tronçonneuse 3D revient marcher sur les plates-bandes de la famille de bouchers dégénérés du Texas. Un nouvel opus estampillé 3D, qui ne dissimule même pas sa volonté de faire fructifier les billets verts engendrés par le remake de 2003 et le préquel de 2006, qui avaient prouvé que ce bougre de Leatherface avait encore la cote. Même si ce sont clairement des aspirations purement commerciales qui ont commandé cet énième chapitre, l’excellente qualité des deux derniers films en date pouvait autoriser tous les espoirs pour ce nouveau chapitre… Après le remake, le préquel, voici donc la suite directe. Débutant à la toute fin du premier film réalisé par Hooper en 1974, Massacre… 3D reprend l’histoire alors que Sally s’enfuit de la demeure des cannibales. Le shérif intervient et somme la famille de se rendre. L’arrivée des bouseux du coin va changer la donne. Plus bouchers que les bouchers, ils vont se faire justice eux-même, canardant tout ce qui bouge et incendiant la maison. Dans cette première séquence, les concepteurs de cette suite n’auraient pas pu envoyer message plus clair au visage du spectateur : faisons table rase de la mythologie créée par Tobe Hooper, Kim Henkel et les autres films, et apportons un bon coup de jeunisme bon marché là-dedans. C’est donc quelques années plus tard qu’une bande de jeunes trous de balles américains écervelés et caricaturaux à souhait prennent la route pour rejoindre une vieille bicoque laissée en héritage à l’une des leurs. Elle, c’est Heather Miller, descendante et héritière de la sinistre famille sans le savoir. Forcément, une fois sur place, la fiesta annoncée ne va pas se dérouler comme prévu, la faute à Leatherface qui a survécu au massacre, et qui vit reclus dans le sous-sol de la maison…
Vacuité abyssale
Sans atteindre le degré de nullité annoncé un peu partout (mais il faut dire qu’il l’a bien cherché), ce Massacre… 3D tend pourtant de nombreux bâtons pour se faire battre. Les concepteurs du projet n’ont de toute évidence rien à faire de la mythologie Leatherface et n’y comprennent visiblement rien (cf plus haut), ce qui est déjà un sérieux taquet envoyé derrière la nuque des adorateurs de l’original. L’ambiance malsaine et poisseuse, l’horreur premier degré suintants du film de 1974 et de ses descendants sont bien loin. Ce Massacre… version 2013 se contente de reprendre « l’idée du concept » de ce qui faisait initialement tout l’intérêt de Leatherface et ses petits copains, pour l’intégrer à un produit ultra calibré, destiné à un public de multiplexe, amateur de sensations fortes et bouffeurs de pop-corn. Rien que la caractérisation des personnages, d’un non-intérêt total et d’une vacuité abyssale, les séquences complètement ratées (la fête foraine, tout le final) en disent long sur les ambitions du projet. Le réalisateur et ses producteurs ne se contentent pas d’afficher leur ignorance de ce qui faisait le sel de la saga, pire, ils le malmènent au sein d’un scénario très casse-gueule. Le parti-pris de faire de l’héroïne l’héritière directe de la famille de cannibales, et donc une cousine de Leatherface, est en soi sacrément gonflé. Evidemment, l’idée est très mal exploitée et confine au ridicule dans la dernière partie lorsque, sortis des rôles du chasseur et de sa proie deux bobines auparavant, les deux s’allient pour faire face aux méchants ploucs texans. Ou comment massacrer sans vergogne la seule initiative un tant soit peu notable du film. Pourtant, les notions de bien et de mal, de chasseur et chassé, l’esprit familial et le sacrifice au-dessus de toute considération, sont des notions intéressantes, mais pas assez exploitées (ou mal). En clair, là où il se veut audacieux, Massacre… 3D se vautre méchamment.
L’inéluctabilité de la mort

Finalement, c’est dans son cahier des charges plus classique destiné à provoquer le frisson facile que le film de John Luessenhop est le plus convaincant. Car, sans atteindre des sommets de suspense et de gore, on ne peut pas enlever au film de très bien fonctionner durant une petite heure. Une réussite qu’il ne doit qu’à son personnage de brute monstrueuse et masquée. De tous les croquemitaines écorchés engendrés par le cinéma d’horreur, Leatherface est très certainement l’un des plus effrayants. Il se dégage du personnage ce côté animal, bestial et instinctif, aussi puissant que sa stature et sa masse sont impressionnantes, ce qui ne laisse aucune échappatoire à ses proies. L’inéluctabilité de la mort n’a jamais été aussi présente que lorsque Leatherface surgit d’une embrasure de porte. C’est dans ces apparitions cauchemardesques, au sein de son antre dans le sous-sol de la demeure, que le film fonctionne à plein régime, réservant quelques séquences très réussies d’exploration, puis de traque dont l’issue ne fait aucun doute. Car le personnage de Leatherface conserve cette aura monstrueuse qui fait de chacune de ses apparitions un sommet de terreur. Même dans les pires films de la série. C’est ce qui est dramatique dans ce Massacre à la tronçonneuse 3D, alors que le film ne vise qu’à enrichir ses concepteurs, on parvient tout de même à l’apprécier. Mais tout le mérite en revient à son emblématique personnage…
MASSACRE A LA TRONCONNEUSE 3D. De John Luessenhop (USA – 2013).
Genre : Survival/Slasher. Scénario : Kirsten Elms et Adam Marcus. Interprétation : Alexandra Daddario, Tania Raymonde, Trey Songz, Scott Eastwood… Musique : John Frizzell. Durée : 92 minutes. Distribué par Metropolitan Filmexport (31 juillet 2013).
L’histoire : Une jeune femme se rend au Texas avec ses amis pour toucher l’héritage de la famille Sawyer, une gigantesque et luxueuse bâtisse. Elle ne va pas tarder à découvrir que cette demeure familiale cache un locataire : Jed Sawyer, dit Leatherface.
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