[Critique] PHANTOM de Todd Robinson
Phantom, deuxième réalisation du scénariste Todd Robinson après Coeurs perdus (2006), prend place dans l’univers ultra codifié du film de sous-marin. Dans le sillage d’A la poursuite d’Octobre Rouge, U-571 et autres USS Alabama, Phantom tente de surnager et se se faire une petite place.
Dans le sous-genre du film de sous-marin, huis-clos par excellence, sur fond de conflits nucléaires, pas simple de se démarquer. Les illustres prédécesseurs de ce Phantom cités ci-dessus, ont placé la barre haute en terme de thriller d’action psychologique oppressant. Todd Robinson choisit pourtant de s’y confronter en posant sa caméra dans l’exiguïté des coursives de son sous-marin russe. Scénariste assez insaisissable (Lame de Fond, Bad Boys 2 ou Night and day), Robinson livre ici un script qui ne brille pas par son originalité (il est d’ailleurs inspiré de faits réels). Mission secrète, mutinerie, trahisons, traumatisme du commandant, enjeux cruciaux et démesurés, retournements de situation… composent l’ADN de ce Phantom qui ne révolutionne pas le genre, piochant allègrement ses influences de ci de là… L’équipage russe au centre du récit est intégralement composé de comédiens américains, et dialogue évidemment en anglais, of course Un choix contestable, qui a la limite peut s’expliquer par des impératifs commerciaux évidents, mais ne favorise pas l’immersion du spectateur, et ne flatte pas son intelligence, contrairement à ce que proposait intelligemment John Mctiernan et ses partis-pris assumés d’utilisation du langage dans… Octobre Rouge… Mais passons…
Sur un rythme somme toute assez lent, le scénariste-cinéaste donne à voir une mise en scène globalement simple mais maîtrisée. Si les premières séquences à l’extérieur sont les plus réussies en terme d’ambition visuelle, l’oppression liée à l’exiguïté du sous-marin n’inspire visiblement pas Robinson, qui filme assez platement les échanges souvent musclés de ses protagonistes à base de champs/contre-champs très classiques.
Phantom contre fantômes…
N’ayant rien de brillant à raconter et ne disposant pas d’une audace visuelle susceptible de camoufler la misère, Phantom dispose néanmoins d’un atout de taille pour ne pas sombrer complètement dans les eaux noires de la médiocrité : son casting béton. Le film est dominé par un Ed Harris toujours aussi charismatique, dans un rôle entretenant, toutes proportions gardées, des rapports avec celui qu’il tenait dans Abyss. Jouant ici de la mâchoire crispée, des sourcils froncés, exposant avec sobriété les fêlures de son personnage, il fait admirablement face à un David Duchovny qu’on était ravi de retrouver dans un film de ce genre, et qui au final, pas très aidé par un rôle à peine écris, déçoit l’assistance. A leurs côtés, l’excellent William Fichtner joue les utilités, tout comme Sean Patrick Flanery (Young Indiana Jones) et Lance Henriksen, pour une courte séquence.
Trop mécanique pour sortir des sentiers battus, sans grande surprise et porté intégralement par Ed Harris, Phantom se suit néanmoins avec plaisir. Si les péripéties de l’équipage russe et les cachotteries de ses agents du KGB lassent rapidement, l’ensemble conserve une aura de sympathie indéniable (en dépit de quelques dialogues pro américains assez hallucinants, heureusement remis en perspective sur la fin). Un sentiment qui se mue en pure émotion lors d’une séquence finale assez gonflée (qui ne plaira pas à tout le monde), entrant en résonance avec le titre du film, et qui frappe par sa sensibilité exacerbée, largement redevable à la belle prestation d’Ed Harris. Et s’il était là, finalement, le cœur de ce Phantom ???
PHANTOM
Todd Robinson (USA – 2012)
Genre Guerre/espionnage – Interprétation Ed Harris, David Duchovny, William Fichtner, Lance Henriksen… – Musique Jeff Rona – Durée 98 minutes. Distribué par Universal.
L’histoire : Le capitaine d’un sous-marin nucléaire soviétique doit quitter sa famille et mener à bien une mission secrète. Une équipe du KGB tente de prendre le contrôle du vaisseau. Le capitaine réalise alors que sa mission était délibérément vouée à l’échec. Le sort du monde est entre ses mains.
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