[Critique] V/H/S par collectif

Be kind rewind

V/H/S

V/H/S

A première vue, l’association du film à sketch et du « found footage » part avec un sérieux handicap. La très mauvaise réputation du second n’offre pas de garantie énorme quant à la qualité générale d’une anthologie, qui plus est, sans le sou. Et pourtant… Conçu par une poignée de jeunes réalisateurs passionnés (dont Ti West, qui a déjà démontré un certain respect pour le genre dans ses petites productions The Roost ou The House of the Devil), V/H/S est clairement un petit miracle. Pas que le film soit complètement réussi, il souffre même de sérieux défauts, mais la sincérité qui se dégage de l’ensemble de ces six segments finit par emporter l’adhésion.
Evidemment, les tares du « found footage » sont bien présentes dans toutes leur splendeur. L’abus de « shaky cam » est notamment poussé à son paroxysme dans certaines séquences, et les allergiques à la caméra tremblotante auront du mal. Mais d’une manière générale, l’usage de la caméra subjective est plutôt bien amenée et justifiée dans chaque court, avec une mention particulière pour le premier et l’utilisation des lunettes caméra. Déjà un bon point. En dépit d’un budget que l’on devine rachitique, Ti West et sa bande ont par ailleurs su intelligemment contourner les restrictions financières de leur projet avec un certain nombre d’idées, souvent très bonnes, et d’astuces visuelles. Les SFX sont d’ailleurs plutôt réussis si l’on ne regarde pas de trop près. Mais ce qui prédomine à la vision du film, c’est surtout son esprit résolument orienté « horreur 80’s », que l’on retrouve aisément dans la représentation des vieilles cassettes VHS. De scénarii solides, les sketches de V/H/S n’en disposent pas réellement. Se contentant d’exposer des concepts de cinéma fantastique et horrifique plutôt que de réelles histoires construites, les concepteurs du film parviennent assez miraculeusement à retrouver l’esprit des films à sketches d’antan. L’aspect foutraque, gore, avec un soupçon de scènes dénudées, des jump scares, etc… de l’ensemble fait planer un aspect assez réjouissant à la vision de la chose. On reconnaît bien là la patte de Ti West qui, dans un genre plus posé et classique, revisitait un pan du cinéma fantastique des 70’s dans son ultra référentiel The House of the Devil. Ici, tout est plus bordélique, l’image saute dans tous les sens, les jeunes protagonistes sont crétins comme jamais, mais la foi en le genre et le basculement dans l’horreur y sont toujours radicaux et, osons le terme, effrayants.

V/H/S

Rembobinage…

Car V/H/S distille un sentiment de peur, certes pas continuel, certaines scènes se gaufrent assez nettement dans ce domaine, mais d’autres font réellement dresser les poils. Le premier segment, Amateur Night, réalisé par David Bruckner (The Signal), cristallise assez bien ces enjeux. Assez long à se mettre en place, il donne à voir une virée entre mecs bien vulgaires et machos, avec filles faciles, sexe, drogue et alcool. Mais le basculement dans l’horreur, que l’on sent poindre grâce au jeu halluciné d’une des comédiennes, n’en est que plus brutal. Le deuxième récit Second Honeymoon, suit un jeune couple parti en week-end au Far-West, dérangé dans sa chambre de motel par une mystérieuse femme. Signé Ti West, ce court joue la carte du réalisme et de l’étrangeté. D’ailleurs, aucune trace de fantastique dans ce segment, mais une ambiance oppressante et inquiétante qui s’achève par un meurtre particulièrement sadique et craspec. La troisième vidéo est clairement la plus faiblarde du lot. Thursday the 17th, réalisé par Glenn McQuaid (I Sell the Dead), se présente sous la forme d’un slasher revisité, qui suit quatre amis partis en balade en forêt, et bientôt pris en chasse par un tueur. Si l’on excepte la visualisation à l’écran assez originale du tueur, pas grand chose à retenir de ce segment.

V/H/S

Basculer dans la terreur

Le quatrième The Sick Thing that happened to Emily when she was younger, mis en boîte par Joe Swanberg, s’inscrit davantage dans la logique et la représentation de la série des Paranormal Activity. Filmée de bout en bout par l’intermédiaire de webcams, cette histoire d’appartement hanté reprend la grammaire visuelle et sonore de la série à succès d’Oren Peli, et n’a donc pas grand chose à offrir de plus. Tout le contraire de 10/31/98, sketch suivant là encore une bande de potes déguisés se rendant à une fête pour Halloween dans un lieu inconnu… et désert. Rapidement, nos quatre larrons vont basculer dans l’horreur absolue en prenant conscience que la cérémonie visant à sacrifier une jeune fille au grenier n’a rien d’une simulation, tandis que la maison les empêche de s’enfuir… Dirigé par quatre réalisateurs sous l’étiquette de « Radio Silence », ce dernier segment est d’une efficacité redoutable, dégagé de tous oripeaux de récit superflus, donnant juste à voir un pur moment d’angoisse et de peur panique. Rarement le basculement dans la terreur pure n’avait été aussi bien représenté, sur un rythme endiablé, idéal de par le format court, ce véritable cauchemar est un petit bijou d’horreur ramassée, avec des effets visuels bluffants.
Quant au récit servant de fil rouge aux différentes histoires, il est lui aussi assez anecdotique en comparaison des autres composants de cette anthologie. V/H/S est un film à sketch qui tire au final clairement le meilleur de ce que l’on est en droit d’attendre d’un film d’horreur en « found footage » actuellement, car il procure de vrais et réels moments d’effrois. Produire un film en caméra subjective sous forme de courts regroupés au sein d’une anthologie est clairement la meilleure idée générée sur le sujet depuis la création du genre. Et V/H/S en est le plus bel exemple !


V/H/S
David Bruckner, Ti West, Glenn McQuaid, Joe Swanberg, Radio Silence et Adam Wingard (USA – 2012)

Note : 3Genre Anthologie horrifique – Interprétation Calvin Reeder, Lane Hughes, Adam Wingard, Hannah Rose Fierman… – Durée 116 minutes.

L’histoire : Une bande de cambrioleurs à la petite semaine s’attaque à une maison isolée pour y dérober d’anciennes cassettes vidéo VHS. Problème, l’occupant des lieux est mort et ils doivent visionner les cassettes une par une, découvrant des vidéos toutes plus étranges les unes que les autres…

Par Nicolas Mouchel

Créateur d'Obsession B. Journaliste en presse écrite et passionné de cinéma de genre, particulièrement friand des œuvres de Brian De Palma, Roman Polanski, John Carpenter, David Cronenberg et consorts… Pas insensible à la folie et l’inventivité des cinéastes asiatiques, Tsui Hark en tête de liste… Que du classique en résumé. Les bases. Normal.
Contact : niko.mouchel@gmail.com

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