[Critique] THE CIRCLE de James Ponsoldt

575672.jpg-r_1920_1080-f_jpg-q_x-xxyxxAdaptation du roman dystopique du même nom écrit par Dave Eggers, The Circle est le cinquième long-métrage de James Ponsoldt. Célébré en 2012 pour son film Smashed, présenté notamment au Festival du cinéma américain de Deauville, le cinéaste portait depuis plusieurs années ce projet d’adaptation aux premier abord ambitieux et ancré dans son époque puisqu’il se propose d’explorer les dérives d’internet, des réseaux sociaux, de dénoncer la connectivité à outrance, le voyeurisme, la paranoïa, ainsi que l’évaporation de la sphère privée et des libertés individuelles au profit d’une transparence totale de l’individu.
Des pistes scénaristiques prometteuses, au potentiel évident pour qui saurait les traiter avec l’audace et le point de vue d’un véritable auteur qui trouverait là matière à s’inscrire dans l’héritage du roman 1984 de Georges Orwell, de son adaptation cinématographique par Michael Radford (1984), ou encore du Social Network de David Fincher (2010), voire du Truman Show de Peter Weir (1998). Un vœu pieu, car James Ponsoldt n’a aucunement l’étoffe des cinéastes précités…

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Cynique et faussement subversif

Situant son action dans un avenir extrêmement proche, le film dépeint la rapide extension d’un réseau social, « The Circle », qui se développe à vitesse grand V et s’insinue progressivement dans l’intimité de ses utilisateurs. Ciblant de manière à peine voilée des géants d’internet comme Google ou Facebook en transposant leurs créateurs dans les personnages interprétés par Tom Hanks et Patton Oswalt, le réalisateur, également scénariste du film, ne cache pas sa volonté de proposer un film dénonciateur, en prenant soin néanmoins de cibler le grand public. Or, viser large ne signifie pas pour autant prendre les spectateurs pour des demeurés, ce que ne cesse de faire The Circle durant près de deux heures.
Le film de James Ponsoldt effleure les thématiques fortes de son sujet sans malheureusement jamais les développer au-delà d’un premier degré naïf et faussement subversif, la faute à un scénario prudent et donc jamais à la hauteur. Là où le film avait le potentiel d’une réflexion puissante sur un fait de société incontournable aujourd’hui, là où The Circle se voudrait thriller poil à gratter, il n’est que l’illustration plate, bête et méchante, de grandes idées exploitées en surface. En l’état, le film de Ponsoldt souffre d’une absence criante de point de vue et d’une approche premier degré extrêmement embarrassante pour un tel sujet. Pour résumer : internet, les réseaux sociaux, le tout connecté, c’est mal. La vie avec les autres, en société, si possible dans la campagne en faisant du kayak et en buvant des bières, c’est bien. Une approche d’un cynisme et d’une naïveté confondantes, caricaturale au possible, tant le film s’embourbe dans un premier degré débilitant.

THE CIRCLE de James Ponsoldt

Des personnages désincarnés

L’héroïne, interprétée par Emma Watson, point d’ancrage du spectateur, est à cet égard totalement dénuée de substance. Tantôt ingénue, candide, puis volontaire et arriviste, avant une prise de conscience tardive sur l’engrenage dans lequel elle a mis le doigt, son parcours à l’écran se passe de toute forme de réalisme. Malgré un beau casting, les autres personnages sont tout aussi caricaturaux et déjà vus mille fois : la bonne copine enthousiaste, qui plonge en un battement de paupières dans la dépression avec déliquescence physique, l’ami d’enfance secrètement amoureux, le gars vrai qui travaille le bois, en opposition aux délires technologiques, dans un premier temps repoussé puis sacrifié… On se demande bien ce que Tom Hanks, gourou empruntant autant à Steve Jobs qu’à Mark Zuckerberg, est venu faire dans cette galère. John Boyega (Star Wars Episode VII), campe de son côté un personnage fantôme, sensé être un levier scénaristique stratégique, mais au final d’une platitude et d’un inintérêt total. Quant à Bill Paxton, quel malheur de spectateur de découvrir son dernier rôle dans un tel film…
Dépourvu de souffle, de tension et d’enjeux dramatiques, premier degré jusqu’à l’écœurement, le film de James Ponsoldt est aussi mal fagoté que son discours est débilitant, embarrassant de ses premières images à son final abracadabrantesque et totalement flou. Trop occupé à proposer des incrustations à l’écran pour soigner l’aspect tape à l’œil de son film, James Ponsoldt en a sûrement oublié de travailler son scénario. Bâti sur les fondations d’un discours se voulant dénonciateur et moralisateur, pour au final n’être que prétentieux et pas à la hauteur, The Circle n’est cohérent que sur un seul point : le zéro sphérique pointé qu’on a envie de lui attribuer.

THE CIRCLE de James Ponsoldt


THE CIRCLE
James Ponsoldt (USA/Emirats arabes unis – 2017)

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Genre Thriller d’anticipation – Interprétation Emma Watson, Tom Hanks, John Boyega, Karen Gillan, Bill Paxton… – Musique Danny Elfman – Durée 110 minutes. Distribué par Mars Films.

L’histoire : Les Etats-Unis, dans un futur proche. Mae est engagée chez The Circle, le groupe de nouvelles technologies et de médias sociaux le plus puissant au monde. Tandis qu’elle prend de plus en plus de responsabilités, le fondateur de l’entreprise, Eamon Bailey, l’encourage à participer à une expérience révolutionnaire qui bouscule les limites de la vie privée, de l’éthique et des libertés individuelles. Désormais, les choix que fait Mae dans le cadre de cette expérience impactent l’avenir de ses amis, de ses proches et de l’humanité tout entière…

Par Nicolas Mouchel

Créateur d'Obsession B. Journaliste en presse écrite et passionné de cinéma de genre, particulièrement friand des œuvres de Brian De Palma, Roman Polanski, John Carpenter, David Cronenberg et consorts… Pas insensible à la folie et l’inventivité des cinéastes asiatiques, Tsui Hark en tête de liste… Que du classique en résumé. Les bases. Normal.
Contact : niko.mouchel@gmail.com

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