[Critique] LE SECRET DES MARROWBONE de Sergio G. Sanchez
Secrets de famille


Ancien scénariste de Juan Antonio Bayona sur L’Orphelinat et The Impossible, l’Espagnol Sergio G. Sanchez passe derrière la caméra pour Le Secret des Marrowbone, son premier long-métrage. Et force est de constater que l’homme ne se renie pas dans cette histoire s’intéressant autant aux fantômes qu’aux sentiments et émotions de ses personnages.
Le Secret des Marrowbone relève d’un croisement entre le cinéma gothique de la Hammer et celui, pas si éloigné finalement, de la vague espagnole du début des années 2000. Au-delà de la coproduction hispano-britannique, c’est surtout la sensibilité de son auteur qui lui donne cette coloration au final, plutôt classique, dans le bon sens du terme.
Sergio G. Sanchez, également auteur du scénario, reste sur des bases qu’il connaît bien, une famille soudée mais sous l’emprise d’une malédiction, des secrets enfouis qui refont surface, une difficile intégration dans la société américaines de la fin des années 60. Le jeune Jack, ses deux frères et sa sœur vivent retirés de tous, faisant croire que leur mère est souffrante mais toujours vivante, par crainte d’être séparés. Sur ce postulat, Sergio G. Sanchez brode une histoire de famille inquiétante où les esprits ne semblent pas loin, jouant sur la crédulité du spectateur en appliquant un suspense typiquement hitchcockien à certaines scènes du film, en particulier autour du personnage du notaire fouineur, que les jeunes héros vont devoir habilement manœuvrer pour éviter qu’il ne découvre la supercherie (magnifique scène autour du verre de citronnade).

Gothique et solaire
Le Secret des Marrowbone dispose déjà d’une solide base de drame familial, auquel le réalisateur ajoute des éléments fantastiques, qui, au final, ne sont pas les plus convaincants du film. Éternelle histoire de maison renfermant un lourd secret et les fantômes du passé… Les moments d’effroi sont plutôt assez bien amenées, le film n’exagérant jamais les jump scare, mais peine à trouver une originalité dans son approche surnaturelle. On pense beaucoup au cinéma de Shyamalan, d’Amenabar ou encore à une œuvre comme La Dame en noir de James Watkins. Pire, les deux principaux mystères de l’intrigue s’éventent assez rapidement et on devine très tôt le fin mot de l’histoire (l’usage des miroirs, symboles ultra rabâchés dans ce genre de production). Pourtant, il y a bel et bien un véritable charme qui se dégage de ce petit film de genre qui s’applique à créer une atmosphère, naviguant paradoxalement entre gothique et solaire. La mise en scène de Sergio G. Sanchez y est pour beaucoup, lui qui prend un soin particulier à composer ses images, à placer ses acteurs minutieusement dans le plan et à les filmer en contre-jour comme des silhouettes et des ombres. Et puis il y a ce casting extrêmement solide, un plateau de jeunes comédiens tous très convaincants, dominé par les excellents George MacKay (Captain Fantastic) et Anna Taylor-Joy (The Witch, Split), dont l’interprétation intense apporte une puissance à leurs rôles. Charlie Heaton (Stranger Things), Mia Goth (A Cure for Life), Kyle Soller (Fury) et le jeune Matthew Stagg apportent également une vraie crédibilité et beaucoup d’émotion aux personnages.
Handicapé par un script assez beau mais finalement peu original, Le Secret des Marrowbone séduit néanmoins par sa plastique et son interprétation. Son approche classique du fantastique, qui ne se laisse pas aller au rythme trépidant des productions horrifiques actuelles, achève de faire du film de Sergio G. Sanchez une œuvre sincère à découvrir.

LE SECRET DES MARROWBONE. De Sergio G. Sanchez (Espagne/GB – 2018).
Genre : Drame fantastique. Scénario : Sergio G. Sanchez. Interprétation : Anna Taylor-Joy, George MacKay, Charlie Heaton, Mia Goth, Matthew Stagg… Musique : Fernando Velasquez. Durée : 111 minutes. Distribué par Metropolitan Filmexport (18 juillet 2018).
L’histoire : Pour ne pas être séparés, Jack, 20 ans, et ses frères et sœurs plus jeunes, décident de cacher à tout le monde le décès de leur mère qui les élevait seule. Ils se retrouvent livrés à eux-mêmes dans la ferme familiale isolée, mais bientôt, d’étranges phénomènes indiqueraient qu’une présence malveillante hante leur unique refuge…
Classique, certes, académique, même, sans doute… mais bouleversant. J’ai adoré !
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Un très beau petit film. Les personnages sont attachants et l’ensemble est plutôt émouvant. Une très bonne surprise en effet 😉
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