[Critique] CONJURING : SOUS L’EMPRISE DU DIABLE de Michael Chaves
Aux Frontières du réel...

Débutée sous la houlette de James Wan, la saga Conjuring atteint aujourd’hui son troisième épisode (pour la série principale), après Les Dossiers Warren (2013) et Le Cas Enfield (2016). Une franchise qui s’est peu à peu fait une place qui compte dans le paysage du cinéma d’horreur, grâce à ses penchants pour l’angoisse atmosphérique, son sens de la mise en scène et son approche de l’épouvante que l’on qualifiera de « classique ». Elle s’est également progressivement constituée un véritable univers horrifique avec la mise en chantier d’épisodes « spin-off » constitués des trois Annabelle (2014, 2017 et 2019), La Nonne (2018) et La Malédiction de la Dame Blanche (2019), qui nourrissent tant bien que mal ce « multiverse » de l’épouvante, une toile qui se tisse sans faire trop de bruit, avec un résultat artistique très inégal. Sur ce troisième opus, le réalisateur d’Insidious se cantonne à la production et au scénario pour laisser la place derrière la caméra à Michael Chaves, déjà en charge de La Malédiction de la Dame blanche.
Cette suite nous plonge à nouveau aux côtés du couple Warren qui, en 1981, fait face à un nouveau cas plutôt inquiétant de possession, d’abord chez un enfant, puis chez un jeune adulte. L’histoire se veut basée sur des faits réels si l’on en croit le carton d’introduction (gage d’intérêt ayant quelque peu perdu de sa pertinence…), puisque le film s’inspire du procès d’Arne Cheyenne Johnson, meurtrier ayant sévi au début des 80’s dans le Connecticut. Sauf que pour la première fois dans la franchise, le cas de possession pourrait avoir une origine humaine et résulter d’une tierce personne mal intentionnée…



Trahi par ses propres rejetons…

Alors que la saga semblait apporter un peu de nouveauté et de fraîcheur avec son cas très différent des deux précédents opus, lorgnant davantage sur l’enquête paranormale à la Mulder et Scully, Conjuring : Sous l’emprise du Diable échoue clairement dans sa volonté de renouveler la franchise. Les raisons en sont simples : un manque d’intérêt et de rythme, une écriture peu convaincante et une impression de « déjà-vu » que la facture technique très correcte de l’ensemble ne parvient jamais à faire oublier. Si le premier opus était un film d’horreur sec à l’ambiance malsaine, tutoyant même le cinéma déviant italien des années 70, que sa séquelle se révélait quant à elle plus inégale mais dotée d’une première moitié étouffante et toujours maîtrisée, ce troisième opus tombe dans le piège de l’œuvre sans âme, dépourvue de personnalité. Quoi qu’on pense du cinéaste, James Wan a toujours su insuffler dans ses réalisations (à quelques exceptions près) sa passion pour un cinéma de genre habité et répondant à des mécaniques de peur très précises, s’inspirant notamment des œuvres traumatisantes et séminales des années 70 et 80, grâce à un savoir-faire et surtout une implication aptes à titiller la fibre des amateurs. On ne retrouve que trop peu d’ambition dans ce troisième opus, bien plus inconséquent et passe-partout comme peuvent l’être des œuvres aussi médiocres qu’Annabelle ou La Nonne. Une profusion de jumps-scares, dépourvus d’efficacité, des créatures déboulant sur les héros et une atmosphère nettement moins lourde qu’à l’accoutumée, voilà comment essorer une série jusqu’alors prometteuse et efficace. On est loin de la tension glaçante et viscérale du premier opus. Ici, tous les effets, aussi joliment photographiés et filmés soient-ils, tombent littéralement à plat. Le déroulé de l’enquête de Lorraine et Ed Warren, digne d’un téléfilm de seconde zone, ne passionnera que les moins exigeants des spectateurs, tant ses ressorts sont cousus de fil blanc de A à Z (merci les seconds rôles d’apporter des éléments déterminants sortis de nulle part). La volonté de faire découvrir un peu plus du passé des Warren, notamment leur rencontre, achève de faire vriller l’ensemble vers la mièvrerie la plus totale. Le couple apparaît de plus en plus comme des justiciers face au Mal, assez éloignés des personnages torturés que l’on aurait pu espérer découvrir… Le pire dans ce Conjuring 3, c’est qu’il n’effraie même plus (Blasphème !), là où ses deux prédécesseurs plaçaient la barre de la suggestion terrifiante assez haut. De fait, malgré le talent technique indéniable et déjà visible sur La Malédiction de la Dame Blanche de Michael Chaves, tout est ici prévisible et on suit l’intrigue avec un bâillement poli. Car si la vérité est peut-être ailleurs, elle n’en est pas moins évidente : à force de multiplier les spin-off et d’irriguer un univers finalement plutôt brinquebalant, la saga centrale Conjuring s’est faite rattraper par les défauts de ses piètres rejetons…
CONJURING : SOUS L’EMPRISE DU DIABLE. De Michael Chaves (USA – 2021).
Genre : Horreur. Scénario : David Leslie Johnson-McGoldrick. Interprétation : Patrick Wilson, Vera Farmiga, Sterling Jerins, Ruairi O’Connor… Musique : Joseph Bishara. Durée : 112 minutes. Distribué par Warner Bros.
J’ai revu les deux précédents avant de voir celui-là… et la comparaison est cruelle…
Dommage car le récit aurait pu s’avérer passionnant avec un minimum de mise en scène…
Là, en effet c’est l’encéphalogramme plat, du début à la fin…
J’aimeJ’aime