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Une bombe, une déflagration, que dire, mais que dire de ce film !? Pour ma première critique sur Obsession B, supposer que j’ai commencé par du lourd est un euphémisme !
Blade Runner 2049 est la suite de Blade Runner sortie en 1982 et se déroulant en 2019, lui-même tiré du roman de Philip K. Dick, Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ? Comme son nom l’indique, la suite du film de Ridley Scott se passe 30 ans après les événements du premier. C’est Denis Villeneuve, le réalisateur canadien de Premier Contact, qui est chargé de la réalisation, Ridley Scott restant lui à la production. Pourquoi attendre 35 ans pour réaliser une suite ? Parce qu’une séquelle à Blade Runner n’allait pas de soi et beaucoup n’en voulait pas de peur de dénaturer l’œuvre originale. La plus grosse difficulté pour moi était d’en savoir le moins possible sur ce film avant de le voir, mais communication oblige, rien n’a pu m’échapper ! De la bande annonce à l’affiche en passant par les court-métrages préquels au film, pour moi, tous les ingrédients étaient réunis pour faire exploser la boite.

Comme avant… mais en mieux

Dès l’intro on est dedans ! Après le « traditionnel » topo écrit en toutes lettres sur la situation en 2049, le film plonge la tête la première ! Là où le premier film s’ouvre sur une ville cyberpunk, sombre et austère, celui-ci s’entame par de vastes champs de panneaux solaires californiens. La claque reste la même, c’est tout de suite grand et déstabilisant. L’officier K, Blade Runner campé par Ryan Gosling, pourchasse la nouvelle génération de réplicant, les Nexus 8. Dans ce futur, la Tyrell Corporation a fait faillite et c’est maintenant la firme Wallace qui s’occupe de la confection des esclaves. Durant cette mission en rase campagne, l’agent K va faire la découverte d’un secret enfoui qui pourrait bien changer la face du monde s’il venait à fuiter.
Sans plus tarder, le film introduit le Los Angeles de 2049 de la meilleure des façons en partant de la campagne à la banlieue, jusqu’à la ville et ses immenses structures urbaines. Un dégradé qui, non seulement élargit notre vision du monde de Blade Runner mais aussi notre façon de le comprendre. Tout ce qui était laissé à l’imagination dans le film de 1982 est plus ou moins montré dans cette suite. Pour le plus grand plaisir des amateurs du genre ! L’exemple parfait est l’Intelligence Artificielle « Joi », conçue par l’entreprise Wallace et qui tient compagnie à l’agent K. L’occasion de faire des prouesses techniques quant à la réalisation des scènes avec cet hologramme augmenté que Jean-Luc Mélenchon n’aurait pas dénigré, mais aussi, et surtout, d’instaurer la question de la solitude propre à l’univers du film original. La relation qui se tisse entre Joi et K fait fortement écho à ce qu’une majeure partie de la population vit en 2049. Un phénomène qu’on devine commun lorsque Mariette, une prostituée réplicante, fait remarquer à K qu’il “n’est pas du genre à aimer les vraies femmes”. Là où Rick Deckard compensait sa solitude avec du whisky, K, lui, opte pour la plus solution de l’intelligence et de la compagnie artificielle !

Transhumanisme ou replicantisme ?

LA question qui a soulevé les foules à la fin de Blade Runner, premier du nom, était “est-ce que Deckard est un humain ou un réplicant ?” Dans cette suite, la question ne se pose pas très longtemps. À peine revenu de mission dans le siège du LAPD, K doit passer en revu son référentiel. En d’autres termes, il faut lui faire un check-up complet pour savoir si une once de sentiment humain se dissimule en lui (l’opportunité de montrer ce qu’est devenu le fameux test Voight-Kampff). Si on ajoute à cela le tag sur sa porte et ses sympathiques collègues et voisins qui l’insultent de “peau de robot” dès qu’il les croise, on peut avancer sans trembler que dans ce film K est un réplicant. Malgré cette mise au point d’entrée de jeu, la question réplicant or not réplicant restera au centre du film. Tout au long de son enquête, K sera amené à passer par tous les états pensant se connaître pour au final remettre en question toute sa vie, sur fond de complot et rébellion réplicante. On a souvent reproché à Ryan Gosling d’avoir un jeu d’acteur de robot (c’est en tout cas une critique que j’ai pu avoir), j’ai tendance à penser que c’était le rôle parfait pour l’acteur de 36 ans qui signe sa première prestation dans un blockbuster de cette taille ! Quelque chose dans ses yeux sème le doute à tout instant sur la nature de son personnage. En fin de compte c’est bien la solitude, profonde, froide et mélancolique qui revient ébranler K ou “Joe” pour les deux dernières minutes de film les plus fortes émotionnellement qu’il m’ait était donné de voir. Là où le premier film nous laissait sur une libération résignée du réplicant Roy, sa suite conserve cette fin emplie de blues et de mélancolie avant de nous quitter sur une ultime note d’espoir.

Comme dans une bulle

Enveloppé dans un cocon, dans une bulle, dans une sphère ! Le monde de Blade Runner autour de soi, les ruelles sombres, pluvieuses et poisseuses des films noires, les robots, les voitures volantes et les lumières du film de science-fiction. Voici ce qui fait l’ADN des films Blade Runner. Il en découle une ambiance unique que le premier opus a su initier et que Blade Runner 2049 sublime à la quasi-perfection. La tâche était ardue, mais pourtant le film a su donner ce que l’on attendait tout en allant encore plus loin. Il repousse les limites de l’original pour fixer les siennes. Il en résulte un savant mélange entre surprise et attentes qui font sortir de la salle le sourire aux lèvres.
J’ai ressenti le film comme une sphère sombre et prenante qui m’entourait tout au long de la projection. Au point de croire qu’en sortant, je me retrouverais plongé en 2049, dans une ruelle obscure et lugubre. Ce futur que l’on s’imagine me semble à la fois proche et lointain, mais ce film, de par les sujets qu’il aborde, me touche personnellement.
Maintes et maintes références marquent lors du visionnage. L’une d’elle prend notamment place lors de sa visite dans le siège de Wallace. K passe par un escalier où se dressent sur ses bords d’énormes bocaux en verres contenant des corps de réplicants nus flottants à l’intérieur. Il m’est alors apparu l’image des cryogénisés du livre de l’auteur américain Don DeLillo, dans son dernier livre, Zéro K. Dans ce roman, des hommes et des femmes se retrouvent cryogénisés et placés dans des verrières, nus et rasés, patientant gentiment qu’on vienne les réveiller. Les réplicants vivent, me semble-t-il, dans le même sentiment d’attente, d’espoir de se libérer de leurs chaînes (quand ils en ont conscience).

Visuellement puissant, musicalement admirable

Si le film de Denis Villeneuve sait à ce point toucher la corde sensible, c’est d’abord par ses thèmes mais aussi et surtout par sa réalisation aux petits oignons ! Le film est noir, sombre et brumeux tout du long. La lumière pénètre rarement l’écran et quand elle le fait, c’est toujours de manière construite avec des architectures, des jeux d’ombres, de teintes et de nuances variant entre le jaune, le rouge et le bleu poussées à l’extrême ! L’ambiance visuelle intelligente et puissante est un point fort du film puisque certaines scènes vous explosent complètement la rétine à vif !
La musique, parfois absente, sublime toujours l’image lorsqu’elle résonne. On se demande comment il aurait pu en être autrement puisque l’inévitable Hans Zimmer est aux commandes ! Le compositeur reprend comme il se doit le flambeau de Vangelis et distille, avec parcimonie, mais à la perfection, le son de synthé caractéristique de la Bande Son originale de Blade Runner. Forgeant l’ambiance et sublimant (encore) l’univers du film. Vous l’aurez compris, j’aurais beaucoup de mal à ne pas considérer ce film comme une pépite, non seulement, à la hauteur du film original, mais peut-être même au-dessus par certains aspects. Il en reste que Blade Runner 2049 respecte son héritage et transcende le matériau de base pour livrer une œuvre sans précédent dans le monde de la SF ! Le film reste quand même une longue fresque de 2h43, mais la longueur s’articule bien et on passe par beaucoup de lieux et personnages en très peu de temps. Ce qui donne l’impression de regarder une saison entière de ce qu’une série Blade Runner aurait donné. 
Blade Runner 2049 ne fera peut-être pas l’unanimité mais reste une expérience puissante et envoûtante de bout en bout ! Denis Villeneuve marque encore de gros point avec ce film et réussit ce que beaucoup jugeaient impossible : faire revivre Blade Runner sans rater la marche. Finalement, il a réussi non seulement à monter la marche mais il a gravit directement tout l’escalier et m’a emmené avec lui. Le film a su montrer tout ce que le futur de Blade Runner avait à offrir, prédisant au passage, ce que notre monde tend à devenir. Si cela permet d’avoir des voitures volantes estampillées Peugeot (cocorico), je prends mon ticket direct !

Note : 5 sur 5.

BLADE RUNNER 2049. De Denis Villeneuve (USA – 2017).
Genre : Science-fiction. Scénario : Hampton Fancher et Michael Green, d’après les personnages créés par Philip K. Dick. Interprétation : Ryan Gosling, Harrison Ford, Jared Leto, Robin Wright, David Bautista… Musique : Hans Zimmer et Benjamin Wallfisch. Durée 163 minutes. Distribué par Sony Pictures.

12 réponses à « [Critique] BLADE RUNNER 2049 de Denis Villeneuve »

  1. Pas si mal, ce Blade Runner 2049, qui ne pouvait de toute façon pas surpasser le film original – on reconnait bien les thèmes de Villeneuve, sur la recherche de ses origines notamment – même s’il y a trop de pistes narratives entremêlées à la fin. Mais parler de « musique qui sublime », là non. 🙂 la musique de Zimmer est atroce (avec un niveau sonore et des infra-basses faits pour compenser le défaut d’inspiration) sauf à la fin quand elle reprend à la note près le thème de Vangelis. J’analyse le film sur mon blog où je le compare notamment au Blade Runner de Scott.

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    1. Avatar de François Hamelin
      François Hamelin

      C’est vrai que la musique de Zimmer n’égale peut être pas le niveau qu’à atteint celle de Vangelis, mais j’ose à penser que si la bande son de ce film divise c’est tant mieux. Je met ça sur le compte du passage du temps, la musique de la suite a un côté plus moderne, plus « lisse », plus percutante. Elle a elle aussi évolué pendant les 30 ans qui séparent les deux films. 🙂

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      1. C’est surtout le niveau sonore qui a augmenté. Elle est assourdissante. Mais surtout, sans aucune inspiration. C’est certainement l’un des plus mauvais score de Zimmer.

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  2. […] son polar suffocant Sicario et alors que tous les regards sont déjà tournés vers la suite de Blade Runner qu’il peaufine actuellement, le cinéaste canadien Denis Villeneuve livre son huitième film […]

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  3. J’aime beaucoup le cinéma de Villeneuve, et là encore, il réussit son pari de générer des ambiances profondes, en utilisant son talent. Sur le plan technique, le film est impeccable, incroyablement esthétisant et l’univers bien assemblé. Mais sur le plan du scénario… Voyons, c’est vraiment très léger. Ja

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    1. Jared Leto en fait des caisses, l’histoire est cousue de fil blanc et le concept même de réplicant, déjà bancal à l’époque, est ici artificiellement poussé vers des limites qui tendent à la paresse scénaristique. En tant que cinéphile, j’ai aimé Blade runner 2049, mais le scénario est d’une banalité totale.

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  4. […] Blade Runner 2049 du Boss Denis Villeneuve dont je verrai tous les films avec délectation et pour la musique […]

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  5. […] et l’illustration d’une maîtrise rare de la mise en scène. En attendant la suite de Blade Runner, aussi redoutée […]

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  6. J’ai honte de le dire devant tant d’enthousiasme mais je suis passée totalement à côté de ce film… ok, c’est très beau mais ça faisait longtemps que je ne m’étais pas autant ennuyée devant un film. A un moment j’ai regardé l’heure en pensant qu’il restait quelque chose comme 30mn mais on en était à peine à la moitié… j’étais à deux doigts de quitter la salle

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  7. […] de transposition de l’inadaptable, surtout après avoir surmonté l’épreuve Blade Runner 2049 avec plus ou moins de succès. On ne saura lui reprocher non plus de vouloir aérer un cinéma […]

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