[Be Kind Rewind] LE RETOUR DES MORTS-VIVANTS 3 de Brian Yuzna (1993)

Aaaaaaaah… Le Retour des morts-vivants 3. Brian Yuzna, l’artisan du gore craspec… Mindy Clarke en zombie rebelle scarifiée… La base militaire en carton pâte… Les effets sanglants généreux… Tout un programme apparu sur les écrans en 1993, porté aux nues par les amateurs de cinéma horrifique et salué par de multiples prix dans les festivals comme Gérardmer ou Amsterdam. Un autre temps… Pour une séquelle entretenant finalement un rapport plutôt éloigné avec la saga du Retour des morts-vivants initiée par Dan O’Bannon en 1985. Après un deuxième chapitre qui n’est pas resté dans les mémoires, ce nouvel opus reste avant tout une oeuvre de Brian Yuzna, cinéaste trop peu reconnu, qui a pourtant marqué de son empreinte le cinéma d’horreur (et surtout gore) des années 90 avec des contributions comme Society (1989), Ré-Animator 2 (1990), Necronomicon (1993) ou encore Le Dentiste (1996). N’ayant pas le talent ni l’aura d’un John Carpenter ou d’un Sam Raimi, Yuzna reste néanmoins un véritable artisan du Bis qui tâche, dans le bon sens du terme, capable de façonner de la belle oeuvre. Et en cela, il occupe une place particulière dans le cœur de beaucoup d’aficionados… Pour Le Retour des morts-vivants 3, il s’est associé au scénariste John Penney afin de créer une histoire de zombies à laquelle se juxtaposerait une love story tragique. Deux éléments à première vue antinomiques (en tout cas à l’époque), que les deux hommes vont parvenir à greffer (et ouvrir la voie à un sous-genre dans les décennies suivantes), comme avait pu le faire Dan’OBannon en 1985 avec l’horreur et l’humour.

Roméo et Juliette chez les Cénobites

Lorsque la jeune et rebelle Julie perd la vie dans un accident de moto, son petit ami Curt profite du laboratoire militaire dans lequel son paternel oeuvre à des expériences douteuses sur les morts, dans l’optique pas stupide du tout de réveiller sa bien-aimée. Problème évident d’une telle résurrection : si Julie a conservé son esprit quasi-intact, sa condition de morte-vivante la confronte à une faim insatiable… ou presque. C’est là que Le Retour des morts-vivants 3 touche juste, dans sa représentation d’un mal qui contraint la jeune femme à s’auto-mutiler, seule solution susceptible de la soulager de sa faim de chair et de cerveaux. Un moyen également de repousser l’inéluctable et de prolonger quelque peu son humanité chancelante. Contraints de fuir, les deux jeunes amoureux rencontrent sur leur chemin différents protagonistes qui vont mettre à l’épreuve la décadence physique et morale de Julie… mais aussi servir de garde-manger. Chouette idée et très belle retranscription à l’écran que cette soif absolue de chair humaine contrebalancée par des scarifications et autres mutilations graphiques que la jeune femme s’inflige, dans un style que n’auraient pas reniés les Cénobites d’Hellraiser. L’amour qui unit les deux jeunes personnages, et cette volonté affirmée chez Curt de lutter contre la zombification de sa compagne, est le cœur de ce film d’horreur qui ne lésine pas sur les effets gores. Yuzna ne se renie pas et offre des démembrages, morsures, déboîtage de crâne et autres dégustations de cerveaux (Brains !) grâce aux effets spéciaux mécaniques et à base de mousse de latex (une belle époque…) signés notamment du spécialiste Steve Johnson (Evil Dead 3). Et clairement, on en prend plein les yeux : c’est organique, ça oscille en permanence entre style réaliste et esprit BD et, même si certains effets ont un peu vieilli, ça remplit toujours son office répugnant.

Alors oui mais bon…

Film marquant des glorieuses années 90, alors que la figure du zombie était clairement au creux de la vague, Le Retour des morts-vivants 3 doit néanmoins payer le tribu des années qui passent et qui ne sont pas sans laisser de traces. A revoir aujourd’hui, il devient clair et net que le film de Brian Yuzna souffre d’un manque de moyens évident. Si les effets et délires gerbo/sanglants restent très corrects, les décors en carton-pâte (le laboratoire militaire fait pitié) trahissent des choix budgétaires pas toujours judicieux. Le film peine à rendre crédible des situations qu’on pourra juger cohérentes en rapport de son statut comic-book, mais qui, au final, s’avèrent assez peu crédibles. Toute la première partie avec les allers-venues dans le labo est à ce titre très capillo-tractée. La direction d’acteur est également très aléatoire et si Melinda Clarke (Mindy pour les intimes…) et J. Trevor Edmond sont ultra-crédibles en amoureux transi, les deuxièmes et troisièmes rôles (bad guys, flics, militaires) restent absolument mauvais comme des cochons. Pas de quoi entamer le plaisir suscité par le film, d’une générosité totale et qui prend réellement son envol et toute sa substance dans sa deuxième partie, mais assez néanmoins pour faire redescendre d’une marche de son piédestal cette sanglante série B imparfaite mais foncièrement attachante, qui a marqué le genre.

Note : 3.5 sur 5.
LE RETOUR DES MORTS-VIVANTS 3
Brian Yuzna (USA/Japon – 1993)
Genre Horreur – Avec Melinda Clarke, J. Trevor Edmond, Kent McCord, Sarah Douglas, Billy Kane, Mike Moroff, Fabio Urena, Basil Wallace… – Musique Barry Goldberg – Durée 97 minutes. Distribué par Le Chat qui Fume (3 octobre 2019).

Synopsis : Curt Reynolds et Julie Walker mènent le parfait amour lorsqu’un accident de la route s’avère fatal pour la jeune femme. Curt emmène alors le corps de sa fiancée dans une base militaire dirigée par son père. Dans ce lieu hautement secret sont menées des expériences visant à ramener des cadavres à la vie au moyen d’un gaz nommé Trioxine. Si Curt parvient à réanimer sa bien-aimée, celle-ci se transforme peu à peu en zombie avide de chair humaine. Semant la terreur dans la ville, Julie trouve dans l’automutilation le moyen de canaliser ses pulsions cannibales…

L’édition Blu-ray du CHAT QUI FUME

Technique

Note : 4.5 sur 5.

Avec cette édition, Le Retour des Morts-vivants 3 peut être redécouvert dans des conditions techniques quasi optimales. L’image est superbe, d’une netteté à toute épreuve, les couleurs vives, les contrastes précis et les contours et niveaux de détails impeccables. Revers de la médaille, l’aspect un peu télévisuel de l’image dans la première partie du film ressort d’autant plus.
Sur un plan sonore, la version anglaise DTS-HD Master Audio 2.0 est impeccable, ce qui n’est pas le cas de la version française, logée à la même enseigne technique, mais souffrant d’un problème de balance renvoyant uniquement sur l’enceinte de gauche. Fort heureusement, l’éditeur s’est engagé à changer gratuitement les disques incriminés qui ne concernent que les premiers pressages.

Interactivité

Note : 4 sur 5.

L’édition propose son lot de suppléments avec des entretiens menés en compagnie des deux comédiens principaux. Dans Roméo est blessé (18′) et Mlle Morte-vivante (20′) la parole est donnée à J. Trevor Edmond et Melinda Clarke qui évoquent leurs auditions et leur complicité sur le tournage, la difficulté du long maquillage à appliquer sur la comédienne, le rythme intensif du tournage et autres anecdotes. Puis, ce sont le réalisateur Brian Yuzna et le scénariste John Penney qui reviennent de manière très détendue sur le projet, dans De la poussière à la poussière (27′), évoquant les pistes de scénario abandonnées, notamment une fin totalement différente.
Fort logiquement, un module est intégralement consacré aux effets spéciaux, véritables stars du film. Le mort ressuscité avec l’équipe FX (20′) interroge les grands artisans du film : Chris Nelson et Steve Johnson, deux figures du domaine qui évoquent l’industrie des effets spéciaux à l’époque. Chris Neslon dissèque la scène du premier zombie (interprété par un SDF), l’époque de la mousse de latex (avant les prothèses en silicone), le système D induit par un budget faiblard ainsi que la participation du réalisateur de Waxwork, Anthony Hickox, apparaissant à l’écran en scientifique zombie. Steve Johnson revient de son côté plus précisément sur le maquillage de Melinda Clark, dont il avait la charge.
Dans Trimark et Trioxin (14′), le producteur exécutif David Tripet revient sur les origines du projet, ses rapports avec Brian Yuzna et son attachement au film. Le monteur Chris Roth y explique son travail sur le film et les démêlés avec la censure.
Deux commentaires audio sont également disponible : l’un de Brian Yuzna et le second réunissant Melinda Clarke et le spécialiste des effets spéciaux Tom Rainone. Malheureusement, les deux pistes ne proposent pas de sous-titres français. Enfin, petite curiosité habituelle chez Le Chat qui fume, le film est également proposé en mode 1.33 Open Matte, soit le format initial lors de sa sortie en salles, ainsi que la piste musicale isolée.


Par Nicolas Mouchel

Créateur d'Obsession B. Journaliste en presse écrite et passionné de cinéma de genre, particulièrement friand des œuvres de Brian De Palma, Roman Polanski, John Carpenter, David Cronenberg et consorts… Pas insensible à la folie et l’inventivité des cinéastes asiatiques, Tsui Hark en tête de liste… Que du classique en résumé. Les bases. Normal.
Contact : niko.mouchel@gmail.com

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